Architecture du choix (1, probablement)

Un très joli dossier, dans Le Temps de ce week-end, sur 'l'angoisse du choix'. Si vous ne l'avez pas encore lu, l'article principal se trouve ici. Même s'il a un défaut important (j'y viendrai), vraiment je vous le recommande.

Le principe? On a en général l'impression que plus on a d'options, plus on a de choix, donc de liberté. Mais la réalité est un peu différente. Imaginez-vous que vous avez décidé d'acheter des céréales pour votre petit déjeuner. Un choix relativement simple. Sauf que lorsque vous arrivez au supermarché, vous tombez devant une centaine de mètres de rayonnages remplis de céréales. Tous sont différents, aucun ne vous est connu. La surcharge totale. Je parle d'expérience, cela m'est arrivé. La honte: j'ai été totalement incapable d'acheter un vulgaire paquet de muesli. Et je ne vous raconte pas les 200 sortes de sauce soja du rayon d'à côté. Face à tellement plus de choix, c'est comme si finalement on en avait moins. L'effort de choisir nous bloque. Ce n'est pas seulement basé sur des anecdotes non plus. C'est là un des résultats d'études tout à fait sérieuses sur ce que l'on pourrait appeler l'architecture du choix. Devant 15 sortes de confitures de fraises, moins de gens finissent par en acheter que devant seulement deux, par exemple. Plus...ce n'est pas nécessairement plus.

Il y a une autre raison pour laquelle plus de choix n'est pas nécessairement une plus grande liberté. Dans mes exemples de céréales, de confitures de fraises et de sauce soja, il ne s'agissait jamais que de choix alimentaires dont l'importance est finalement assez faible. En tout cas quand on les prend un par un. Pas vraiment de choix identitaire là-dedans. Le temps que l'on dépense à choisir une confiture ou une énième série télé, ce n'est pas vraiment le grand exercice de la liberté. On en viendrait même à se dire que si, pendant ce temps passé à faire ces choix anecdotiques, on ne se demande pas si l'on veut vraiment passer tout ce temps à manger des tartines devant la télé, alors on aura au final perdu de la liberté. Une conclusion plus dérangeante, celle-la.

Mais par ailleurs justement, il y a des choix identitaires auxquels il est important de pouvoir participer et qu'on ne peut pas mettre à la même enseigne que les choix de céréales. Parmi eux, les choix qui concernent nos traitements médicaux. Là, malheureusement, le dossier de ce week-end va trop vite en besogne. Il présente une discussion sur la décision médicale partagée. Un sujet inclus dans les études de médecine depuis un certain temps, et qui commence à l'être sous cet intitulé. Mais évidemment, il ne s'agit pas ici de faire choisir son traitement à une personne malade comme s'il s'agissait de son petit déjeuner. Partager les décisions médicales entre patients et médecins c'est une affaire importante, mais aussi une affaire sérieuse. Elle mérite...du soin. Des compétences et de l'adaptation. Respecter la liberté d'un patient, cela voudra parfois dire lui laisser une part importante des décisions, mais parfois aussi respecter son choix de ne pas être celui qui choisit. Être inclus dans la décision, pour certains cela signifie déjà simplement être informés suffisamment pour pouvoir, le cas échéant, donner leur avis. Certaines personnes qui préfèrent par ailleurs laisser décider leur médecin souhaitent quand même avoir toutes les informations les concernant. Dans la plupart des cas, cela signifie davantage: vraiment décider ensemble. C'est-à-dire discuter, pour le patient se faire son idée, pour le médecin accompagner une personne malade à travers une décision qui -oui- peut être délicate. Un exercice difficile, où la manière compte énormément. Il doit s'apprendre et s'affiner par l'expérience. Et parce qu'il ne s'agit que rarement de décisions triviales, cette liberté-là doit compter plus que celle de choisir sa confiture.

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Mes collègues: dignité, dignité...

J'avais commencé ce blog sur une question de dignité. Celle des plantes, en l'occurrence. Le billet que je vous recommande aujourd'hui dans la série 'mes collègues' me fait donc particulièrement plaisir. C'est un concept qu'on n'explore pas assez, la dignité. On est trop souvent occupé à le brandir. Et il est bien, Nicolas Tavaglione. Comme d'habitude, un extrait et le lien:

Antonio Hodgers, face à Darius Rochebin sur la RTS, invitait cet été les Genevois à ne pas donner de l’argent aux mendiants. La voix est douce, le regard évangélique et l’argument inattendu: l’aumône contrarie la dignité humaine – dont le mendiant, M. Hodgers est humaniste, est tout autant porteur que l’honnête travailleur. Je me sens concerné par l’invitation, puisque, genevois, j’appartiens au public-cible. Et puis voilà un homme gentil qui recommande un acte sévère. Alors je suis forcé de réfléchir.(...)


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