Malades et toujours citoyens

C'est le moment de mon billet dans la Revue Médicale Suisse. Cette fois, j'ai un peu changé de sujet après une conversation avec un collègue oncologue. On ne mesure pas encore tout à fait la portée des progrès médicaux face au cancer, mais ils ont été impressionnants ces dernières années. Le résultat: de plus en plus de patients vivent avec un cancer qui, sans être guéri, commence à ressembler de plus en plus à une maladie chronique. C'est magnifique, et en même temps cela laisse ces personnes dans une situation qui ne l'est pas toujours. Évidemment, cela touche aussi d'autres maladies. Voilà un chapitre où il faudrait que nous fassions mieux. Le lien se trouve ici.
 
"L’année de ma naissance, le philosophe américain John Rawls a énuméré ce qu’il appelait les biens primaires. Ces biens dont tout le monde a besoin. Certains sont naturels : parmi eux la santé bien sûr, mais aussi l’imagination ou l’intelligence. D’autres sont sociaux. Ils comprennent les libertés et les droits fondamentaux, la liberté de mouvement et le libre choix parmi un nombre large d’occupations, l’accès aux positions de pouvoir et de responsabilité, le revenu et la fortune, et celui qui d’après lui est le plus important de tous : les bases sociales du respect de soi. Il veut parler ici de la reconnaissance des citoyens par les institutions, qui sous-tend notre sens de notre propre valeur et la confiance de mettre nos projets à exécution. Selon lui, tous les citoyens ont un intérêt à obtenir plus de ces biens primaires. C’est la tâche d’une société d’évaluer à quel point ils y parviennent. C’est la manière dont ces biens sont distribués qui est la mesure d’un système politique.

Nous le savons tous, certaines maladies représentent ici une double atteinte. En plus d’ôter la santé, la maladie et surtout la chronicité rognent également les bases sociales du respect de soi. Quand la maladie est aiguë, c’est une parenthèse. On l’ouvre le temps de guérir, puis on la referme. Lorsqu’elle est chronique, c’est le restant de la vie qui peut glisser dans une sorte de citoyenneté de seconde zone.


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