C'est un sujet difficile. Un de ceux qui nous divisent. Lorsqu'une
personne demande une assistance au suicide, cette personne doit-elle
être en fin de vie pour l'obtenir?
Cette question nous divise comme citoyens. Elle divise aussi le corps médical.
L'Académie Suisse des Sciences Médicales a récemment mis en consultation une directive qui autoriserait l'entrée en matière dès lors que "Les symptômes de la maladie et/ou les limitations des fonctions du patient lui causent une souffrance insupportable", et à condition (entre autres) que "Des options thérapeutiques indiquées du point de vue médical ainsi que d'autres aides et soutiens ont été recherchés et ont échoué ou sont considérés comme inacceptables par le patient". Le patient n'aurait donc pas besoin d'être dans un état laissant penser que sa mort est proche.
La FMH a récemment annoncé son opposition à cette possibilité. Des médecins se sont cela dit aussi exprimés en faveur de cette solution et regrettent parfois même que l'ASSM ne soit pas allée plus loin.
Hans Stalder, qui écrit dans le Bulletin des Médecins Suisses, commente ainsi un cas imaginé:
Mon patient de 80 ans est fatigué de vivre. Sa femme étant décédée, ses
enfants quasi absents, il refuse d’aller dans un EMS. Je lui réponds
que selon la déontologie médicale actuelle, je ne puis l’aider que si
son décès est proche, mais que selon les nouvelles directives [2], je
devrais m’assurer que ses souffrances sont insupportables, en cas de
doute appeler un spécialiste pour évaluer sa capacité de discernement et
consulter une tierce personne pour confirmer que son désir de mourir
est mûrement réfléchi. Mon patient me répond: «Pourquoi toutes ces
conditions? Vous me connaissez de longue date et j’ai pleine confiance
en vous.»
...
Qui décide que les souffrances sont insupportables? N’est-ce pas une
attitude patriarcale d’en faire une décision médicale visant plutôt à
rassurer le médecin qu’à aider le patient? De plus ces directives
risquent de prolonger la souffrance inutilement, surtout en cas d’issue
fatale proche, car elles exigent même pour le médecin de famille
connaissant bien son patient, que la capacité de discernement soit
évaluée en cas de doute par un spécialiste et que le désir de mort soit
durable et confirmé après des entretiens répétés et par une tierce
personne.
Francis Thévoz lui répond ici que Les chiffres de la croissance importante des inscriptions à Exit et
celle des aides en fin de vie révèlent un changement profond de
l’opinion publique devant la souffrance et les douleurs qui précèdent
une mort que les médecins annoncent tout en refusant d’aider à mourir.
Personnellement, je comprends bien cette attitude médicale, mais c’est
votre patientèle qui ne la comprend pas! Et le risque d’une
réglementation existe qui pourrait ignorer et la volonté du malade, et
celle du médecin de proximité.
La FMH a raison, c'est clair: l'évaluation d'une "souffrance insupportable" posera effectivement des difficultés aux médecins. Cela ne signifie pas forcément, pourtant, que l'exercice doive être interdit aux médecins qui l'accepteraient. Une vraie question, donc.
Et vous, qu'en pensez-vous?
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