La force de nos attentes

J'adore cette illusion d'optique. Pas de dessin sophistiqué, rien qu'une photo. Et pourtant on dirait qu'Escher est passé par là. Comment ça marche? A la force de nos attentes. Nous sommes simplement habitués, sans doute cablés, même, depuis le temps, pour voir des personnes ... à l'endroit.

Là où ça devient fascinant, c'est que ça marche dans un tas d'autres domaines. Sur le plan éthique aussi, d'ailleurs. Et là nos attentes peuvent nous piéger.

Par exemple, elles peuvent 'fabriquer' de la pathologie. Si le travail que nous considérons comme 'normal' augmente, il y aura plus de handicapés: car qu'est-ce que le handicap, sinon l'incapacité (durable) à fonctionner comme nous l'attendons?

Elles 'fabriquent' aussi de la discrimination. C'est une des raisons, d'ailleurs, pour lesquelles il n'est pas si simple d'être juste. Malcom Gladwell explique ça très bien dans un bouquin qui a maintenant été traduits en français sous le titre un peu malheureux de 'La force de l'intuition: prendre la bonne décision en deux secondes'. C'est presque drôle, car ce titre joue bien sûr aussi sur nos attentes. Mais malgré son aspect un peu psycho de salon, c'est en fait un bouquin passionnant, très bien documenté, qui parle davantage des risques de la 'pensée instantanée' que de ses avantages, et qui vous laissera justement...songeur. Il y démonte à la fois les avantages et les inconvénients de nos conclusions immédiates, intuitives, qui parfois nous sauvent et parfois nous coulent.

Une des illustrations est l'histoire des orchestres européens, disons il y a quelques décennies. Ils étaient exclusivement masculins. Aucune discrimination là-dedans, expliquaient les jury de sélection. Le timbre des musiciennes est tout simplement différent, les décisions sont esthétiques. Sauf qu'un jour on se mit à auditionner derrière un écran. Et là, patatras, plus de différence de timbre. Avec les mêmes jurés, les mêmes goûts et les mêmes objectifs pour leurs orchestres. Mais leurs attentes étaient différentes en écoutant 'quelqu'un' qu'en écoutant un homme ou une femme. Les orchestres devinrent mixtes.

Alors, maintenant que vous venez de lire ça, vous vous sentez supérieur? Vous êtes un fervent égalitariste et êtes convaincu que vous n'associez aucun rôle particulier aux hommes et aux femmes, aucun jugement de valeur à l'appartenance ethnique, aux préférences sexuelles, ou autres âges de la vie? C'est très simple à vérifier. Il existe un test en ligne qui mesure l'effet de nos attentes implicites sur notre temps de réaction. Vérifiez, c'est ici. C'est désarmant. En fait, des biais de ce genre, on en a plus ou moins tous.

Alors pour rappel, deux avertissements:

  • D'abord, on peut avoir un biais et décider de ne pas l'approuver. Aucune obligation, donc, de vous faire une raison d'accepter votre biais contre les personnes handicapées, par exemple, s'il s'avère que vous 'testez positif'. Vous pouvez paisiblement continuer de militer pour des droits égaux la conscience tranquille. Rejeter un biais n'est pas se trahir.
  • Mais par contre, on ne peut pas décider juste comme ça de ne pas avoir le biais.
On peut par contre le savoir, et prendre des précautions en conséquence contre notre propre jugement instantané. Déjouer les pièges de nos attentes, en quelques sortes.

Il y a même mieux. Car nous avons aussi des attentes morales. Gordon Brown a récemment donné à ce sujet une conférence sur ces images qui nous indignent, et parfois nous poussent collectivement à des actions qui améliorent le monde. Jouer sur nos attentes pour faire le bien, c'est donc possible.

Et puis il y a la version où nous sommes capables de rire de nos propres intuitions. Dans cette vidéo, on arrive à faire chanter le public en choeur sur la simple force de nos attentes. Inquiétant? Un peu. Ca marche vraiment très très bien et on se prend à demander à quoi d'autre ça peut diantre servir. Mais une fois qu'on a vu ça, peut-être qu'on se laisse moins facilement avoir?

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Conseils en cas de pandémie (3)

L'été fut plutôt tranquille sur le continent, mais à présent la grippe H1N1 augmente peu à peu et l'on s'attend à une accélération dès la rentrée des classes. Quelques rappels:

L'accélération est prévue fin août-début septembre. Mais le vaccin n'est attendu qu'en octobre. Il est donc important de se protéger. Même si les cas graves restent rares, ce n'est jamais drôle d'avoir la grippe. En plus, certaines personnes sont véritablement plus à risque. Freiner l'épidémie n'est donc pas inutile. Cela pourrait permettre d'épargner des personnes vulnérables le temps que le vaccin arrive. Est-ce possible? Pas sûr. Mais se protéger soi-même, c'est aussi essayer de protéger les autres...

Les conseil indiqués ici et ici sont toujours d'actualité. Il y a aussi un très bon dossier sur le site de la tsr. Le site de l'OFSP est ici. Il résume toute une série de conseils.

Le plus important est sans doute de se laver les mains. Et l'on sait qu'on a tendance à ne pas aller assez souvent au lavabo: un désinfectant est une bonne solution pour ces fois où c'est trop loin, trop long, trop compliqué. On s'en sert ainsi. Il existe plusieurs version format poche, disponibles en pharmacie. Et si l'épidémie débarque ce sera probablement le dernier cri d'avoir ça bien en vue.

Le masque n'est actuellement recommandé que pour les personnes malades.
Par contre, éviter les poignées de main est une bonne idée. Anti-social? Pas nécessairement. Il suffit d'adopter un salut asiatique. Souriez, mains jointes, et inclinez-vous légèrement...On verra si ça prend.

Le virus se propage le mieux dans les contacts humains. Un des moyens de le ralentir est donc de ne pas pénaliser les employés qui prennent congé pour maladie...ou pour soigner un proche. Dans les deux cas ils seront fortement susceptibles de transmettre la grippe. S'ils viennent travailler malgré ça par crainte de la crise économique, ils seront souvent contagieux. Ce sont là des circonstances ou la solidarité est bonne pour la 'santé' (dans tous les sens du terme) des entreprises...

C'était qui, déjà, ces gens qui avaient dit que l'économie et l'éthique faisaient mauvais ménage?

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Enseigner les médecines complémentaires

Après la votation populaire du 17 mai, lors de laquelle 67% de la population à accepté de 'prendre en compte' les médecines complémentaires, les défenseurs de ces techniques frappent à la porte des universités. Pour rappel, cela faisait partie des objectifs affichés (quoique remarquablement peu commentés et encore moins discutés) lors de la votation. Extrait du document des initiants:

'Chaque médecin doit au moins se familiariser avec les principes de méthodes de traitement qui sont demandées par une majorité de la population. (...) A l'avenir, les cinq méthodes à inclure dans l'assurance de base (médecine anthroposophique, homéopathie, thérapie neurale, phytothérapie, médecine traditionnelle chinoise MCT) devraient disposer au minimum d’un poste de professeur ordinaire chacune. Les branches qui travaillent avec des médicaments auraient en outre besoin de professeurs pharmaciens (c.-à.-d. toutes, à l'exception de la thérapie neurale). Il faudrait encore deux autres professeurs pour la médecine vétérinaire complémentaire et pour la médecine dentaire globale.'

Les universités ne sont pas enthousiastes. Et comment ne pas le comprendre? Leur tâche est d'enseigner la connaissance humaine et ses limites. Pas question, donc, d'enseigner des 'connaissances' non démontrées sans expliquer clairement qu'elles ne le sont pas. La presse l'a bien compris: le seul enseignement (relativement...) facile à intégrer est un enseignement critique, qui présente les techniques non démontrées pour que les futurs médecins sachent qu'elles existent, mais souligne clairement ce qui est démontré (actuellement, fort peu) et ce qui ne l'est pas. Vus à cette lumière-là, les revendications cités plus haut semblent vite énormes.

En fait, depuis toujours, la balle est dans le camp des médecines complémentaires. Alors oui, une des difficultés est que les thérapies mentionnées dans le même souffle sont en fait très différentes l'une de l'autre. Mais s'exposer à l'épreuve de vérifications scientifiques n'est pas, pour un corpus thérapeutique entier, du crochet aux fenêtres. C'est la condition pour pouvoir être intellectuellement honnête devant des étudiants auxquels on enseignerait ces pratiques comme 'indiquées' et pas juste comme 'existantes'. Car même si, OK, un seul ne suffit pas, c'est un des critères d'une pseudo-science, ça: l'absence de vérification empirique des hypothèses proposées.

L'exemple qui a le plus fait parler, et qui a la plus large utilisation en Suisse, est sans doute l'homéopathie. Pour le prendre en exemple ici, cela tombe bien parce que cette technique est vraiment très mal étayée par des preuves scientifiques.
Pourquoi? Certains praticiens (plus rares aujourd'hui il est vrai) avancent l'impossibilité intrinsèque d'étudier les granules homéopathiques selon les méthodologies employées en médecine scientifique:

'L’un des paramètres des études randomisées conventionnelles est la nécessité de répartir les patients en groupes nosologiques (diagnostiques) bien définis : par exemple asthme, bronchite chronique obstructive, infarctus du myocarde, etc. selon des critères qui relèvent exclusivement du système étudié, ici la médecine conventionnelle. Or, un des principes est l'adaptation au patient. Il est donc contraire aux principes de l’homéopathie d’étudier l’efficacité de tel ou tel remède pour l’« asthme », ou la « bronchite chronique ». Toutes les études consacrées à l’homéopathie souffrent cependant de ce biais constitutionnel.'

Il faut avoir conscience que cet argument est faux. Ce n'est pas moi qui le dis: dans les années 90, un groupe interdisciplinaire incluant des praticiens homéopathes a conclu que c'était possible d'étudier scientifiquement leurs approches. Reste à le faire, et à avoir des résultats positifs fiables.

Il semble aussi qu'il soit possible de développer des méthodes 'taillées sur mesure' en appliquant les principes de statistique médicale pour construire des études qui respecteraient les principes de l'homéopathie. A titre s'exemple, la méthode suivante a été proposée pour montrer qu'une même granule homéopathique a fiablement le même effet chez une personne saine:

1) Demandez à un homéopathe diplômé de choisir 6 différents produits homéopathiques
2) Envoyez-les à une personne neutre, qui n'a pas d'avis sur la question et n'est ni 'pour' ni 'contre' l'homéopathie.
3) Cette personne neutre doit enlever les étiquettes et tout identifiant, pour les remplacer par des numéros. Et garder la clé de décryptage.
4) Suite de quoi elle renvoie le tout à l'homéopathe.
5) Il (ou elle) prend alors les produits un par un, en respectant un délai suffisant (à fixer à l'avance) entre chacun, et note tous les effets ressentis.
6) En se basant sur sa propre description, il note quel produit correspond, selon lui, à quel numéro.
7) On compare sa copie avec la clé de décryptage.

Ce n'est pas un essai randomisé. Mais on a seulement une chance sur 720 de deviner les six substances justes au hasard. Ce test serait donc très convaincant. Et couterait des cacahuètes.
Sa crédibilité serait encore augmentée si les investigateurs publiaient leurs méthodes à l'avance, en précisant quels seraient leurs critères de réussite ou d'échec, et s'ils décrivaient les biais potentiels et les démarches suivies pour les éviter.

Une méthode plus ou moins à la portée de chaque praticien, avec ou sans financement extérieur, et pour autant qu'il/elle soit suffisamment motivé(e) pour y passer du temps.

Alors, des volontaires?

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La planète, l'argent, et nos poumons

Eté, feux de camp, barbecue: en apparence, que du bonheur!

Sauf que pour une grande partie de l'humanité, cuire sur un feu ouvert fait partie du quotidien. Et que ce n'est pas anodin pour la santé. Imaginez: vous êtes une mère de famille pauvre dans une région rurale d'Asie. Vous passez 4-5 heures par jour à cuisiner sur un feu ouvert. Il en émane du dioxide de carbone, du monoxyde de carbone, de l'oxyde nitreux, du dioxyde de souffre, plein de choses pas sympa. Ce foyer n'a pas de cheminée. Il se trouve dans la seule pièce de votre maison. C'est là que dort toute la famille. C'est là que vous mangez. Si vos enfants sont scolarisés, c'est également là qu'ils font leurs devoirs. Maintenant, multipliez ce scénario par 2.4 milliard de personnes. Et si vous vivez en altitude (par exemple dans l'Himalaya), vous allez probablement fermer portes et fenêtres et laisser brûler le feu en permanence.

A l'arrivée, 1 million et demi de personnes meurent chaque année d'avoir respiré la fumée de foyers domestiques. La fumée passive de la cigarette et des feux de cuisson domestiques pourraient aussi augmenter le risque de tuberculose.

En plus, évidemment, ramasser du bois, ça coûte soit du temps (pendant lequel, par exemple, vos enfants ne seront pas scolarisés) ou de l'argent (que vous n'avez probablement pas).

Et pour corser le tout, c'est un facteur de déforestation massif.

Heureusement, la recherche d'alternatives court, et de plus en plus elle aboutit. Il est désormais possible de fabriquer des briquettes combustibles avec toute une série de matériaux qui seraient sans cela considérés comme des déchets. Les pelures de bananes. La paille. Les trognons de maïs. Toute une série d'autres choses, selon ce qui est disponible près de chez vous. Et de le faire avec des moyens largement disponibles dans les régions rurales pauvres. A la base, de la technologie de haut vol: des trésors de créativité scientifique, dans le but d'aboutir à une technique si simple qu'elle est directement applicable dans un village africain. La vidéo qui est ici l'illustre très bien.

Appliquer ça permettrait de retourner complètement le scénario de tout à l'heure: au lieu de dépenser votre argent pour acheter un combustible qui vous intoxiquera, vous aurez désormais la possibilité de transformer vos déchets en combustible propre, peut-être même d'en vendre l'excédent autour de vous.

Franchement, combien de trucs parviennent comme ça à améliorer en même temps votre santé, votre situation financière, et votre impact sur l'environnement, alors même que vous êtes parmi les personnes les plus démunies du monde? Cette information il faut la diffuser vite, très vite...

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Nos filles et nos fils

On le sait depuis longtemps, si le rapport hommes/femmes dans une société augmente, la criminalité augmente aussi. La politique chinoise de l'enfant unique, et la préférence pour les garçons qu'elle exacerbe assez inévitablement, a déjà été critiquée pour cela. Mais ce n'est pas seulement la criminalité qui monte quand on diminue le nombre de femmes. Les garçons aussi se font kidnapper. Dure dure, cette réalité relatée ce printemps dans le New York Times. La politique de l'enfant unique...rend les enfants très très précieux. Et une des réactions est qu'ils se font voler à leurs parents.

Cette histoire est terrifiante, entre autre (mais pas seulement bien sûr!) par sa démultiplication. On peut dire bien des choses à ce sujet. Par exemple que les autorités chinoises prennent le problème au sérieux...mais il est révélateur que cela signifie parfois, pour les coupables, le peloton d'exécution. On serre fort d'un côté, les décisions humaines s'échappent comme le sable que l'on serre entre ses mains, on serre fort d'un autre côté...bref c'est une mauvaise solution.

La bonne solution, ce serait la diminution des préférences pour les fils. Naïf? Peut-être. Sauf qu'il semble que cela ne soit plus si illusoire...

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Mourir ensemble

On en avait parlé en avril alors qu'il s'agissait de réflexions annoncées. Que penser de l'assistance au suicide d'un conjoint en bonne santé, si un couple formait le projet de mourir ensemble? La semaine dernière un des chefs d'orchestre les plus réputés d'Angleterre, Sir Edward Downes, est venu en Suisse accompagner sa femme auprès de l'association Dignitas. Ils étaient mariés depuis plus d'un demi-siècle. Elle, atteinte d'un cancer incurable, souhaitait mettre fin à ses jours. Lui, progressivement aveugle et surtout bientôt veuf, n'a pas voulu lui survivre. Ils sont morts ensemble.

On est frappé par l'unanimité de leur entourage sur le caractère rationnel de leur projet. Et également par le courage de leurs enfants. Car en plus de la peine qu'il y a à perdre ses deux parents en même temps, on risque en théorie la prison en faisant le voyage avec un candidat à l'assistance au suicide. Cela dit, les lois du Royaume Unis reflètent elles aussi la perplexité générale face à l'assistance au suicide. Récemment, la chambre des Lords anglais débattait d'un point tatillon mais important: faut-il décriminaliser le fait d'accompagner un citoyen britannique en vue d'une assistance au suicide dans un pays étranger? Ils ne l'ont pas fait. Mais des 117 proches ayant accompagné un citoyen britannique à Zurich en vue d'une assistance au suicide, aucun n'a été inquiété par la justice anglaise.

Cette ambivalence qui entoure le choix de mourir, il est bien sûr difficile de ne pas la partager. Les commentaires sur cette version contemporaine du pacte de suicide amoureux la révèlent d'ailleurs une fois de plus. Mourir avec son conjoint, est-ce un choix véritablement libre? La nécessaire évaluation de la capacité de discernement, difficile à se meilleures heures en cas d'assistance au suicide, prend la une tournure bien particulière. Et que signifie être amoureux, sinon que notre pensée n'est pas indépendante, mais que c'est cela même que nous considérons comme le plus fondamentalement notre?

Du coup, serait-ce là l'ultime preuve d'amour? La question est hantée de l'histoire des bûchers funéraires où les veuves étaient brûlées, parfois pour éviter l'opprobre de l'avoir refusé...Mais d'autre part, comment peut-il s'agir de 'prouver' quoi que ce soit, à l'autre, en pareilles circonstances? Et comment peut-il s'agir de raisons dont il faudrait rendre compte en public?

Car fondamentalement, notre ambivalence reflète l'un des fondements de la légalité de l'assistance au suicide en Suisse: la notion que cela puisse représenter la clôture naturelle d'une biographie, le choix qui reflète ce qui a précédé dans la vie d'un individu. Au même titre que le choix d'attendre la mort 'spontanée', de prendre ce qui reste. Admettre cela (et la plupart des pays du monde ne le font pas), c'est ancrer le choix de mourir dans nos notions, très diverses, de la bonne vie. C'est du coup accepter qu'il ne peut se réglementer que par là. On l'interdira à qui ne fait pas un choix libre (pas de pression, donc) ou authentique (pas de suicide causé par une maladie mentale, donc). On en interdira la pratique à qui ne tient pas compte, uniquement, de la valeur du choix dans la vie de la personne qui meurt. Si j'en retire de l'argent, ou tout autre avantage personnel, mon motif est donc suspect.

On devrait aussi en interdire la pratique à qui ne vérifie pas tout cela avec soin. Le canton de Zurich, qui vient de passer un accord avec l'association EXIT pour garantir justement cela, n'a pas établi d'accord similaire avec Dignitas. C'est la source, en Suisse, d'un certain malaise autour de cette association, qui reste la seule à pratiquer l'assistance au suicide auprès d'étrangers non résidents. Ce malaise n'est pas le problème de la famille Downes. Mais dans la mesure où il concerne une pratique qui s'applique à leurs citoyens, cela pourrait être en partie le problème des législateurs britanniques.

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Vers la fin de la blouse blanche?

Bon, c'est l'été, on a tous un peu tendance à porter moins de vêtements que sur cette photo. Mais là c'est un peu différent. La très officielle et très médicale American Medical Association vient de voter une proposition ... pour l'abolition de la blouse blanche.

Non non, ce n'est pas une plaisanterie. En plus ils se tâtent et rien n'est encore définitif. Mais en fait, le vénérable survêtement médical n'a pas que des avantages. Les médecins écossais l'ont d'ailleurs déjà mis au placard.

Premier inconvénient incriminé: les manches. Une des activités quotidiennes les plus importantes des soignants est de se laver les mains. Mais vous avez vu tout ce tissu sur les poignets? Ça brosse, ça touche à tout, et ça empêche de se laver les mains correctement. Techniquement, il faudrait aussi enlever la cravate aux Messieurs: impossible de la garder vraiment disciplinée. Plein de choses sur cette photo qui risquent un jour de sérieusement la dater...

Que sacrifierait-on avec 'la blouse'? La réponse n'est pas si évidente. Elle 'fait sérieux', d'accord. On se dit qu'un habillement plutôt conservateur a plus souvent tendance à inspirer confiance. Et c'est un de ses buts. Mais en fait il semble que la plupart des personnes préfèrent...ce que porte leur propre médecin. Ceux dont le médecin ne porte pas le blanc, donc, ne s'en offusquent apparemment pas.

On perdrait certainement du symbole. Dans certaines universités américaines, la blouse blanche est remise aux étudiants en médecine lors d'une cérémonie rien que pour ça, extrêmement formelle. Mais ils sont parfois tellement fiers ensuite qu'ils vont boire leur café en blouse blanche dans le quartier d'à côté: et là je vous promet que le symbole en prend un coup.

Et tant mieux, en fait. Car porter l'uniforme ne sert-il pas d'abord à ériger des barrières? Si un médecin est utile d'abord par ses connaissances, par son expérience, se mettre dans une posture susceptible d'en rendre la communication plus difficile est à double tranchant.

Bon, OK, les jeunes médecins devraient peut-être travailler un peu plus dur pour être respectés par leurs patients âgés: pas toujours facile d'écouter sérieusement l'avis de quelqu'un qui pourrait être votre petit-fils ou votre petite-fille. Mais avec ou sans blouse cette difficulté va demeurer. Et comme on dit, pour les jeunes collègues concernés c'est un problème que le temps résout tout seul.

On perdrait des poches. On ne rit pas, c'est très important. Dingue ce qu'on peut y mettre.

On perdrait des difficultés, aussi. Les enfants qui ont peur de vous, dont les parents les ont peut-être (malheureusement ça existe) menacés de piqures s'ils n'étaient pas sages. Ceux-là auront moins peur, et leurs visites médicales se passeront mieux. J'ai testé, en pédiatrie, les deux systèmes, et la sérénité du contact en civil a une valeur indéniable.

C'est que le symbole n'est pas sans mélange. On risque de transmettre plus de germes en blouse à manches longues, mais on transmet certainement aussi des attentes. Bonnes souvent, mais pas toujours. Enlever la blouse ne permettrait d'éradiquer ni les un ni les autres. Ça n'épargnerait pas l'effort de se laver les mains. Ni celui d'être compréhensible, d'écouter. Mais ce serait un pas intéressant. Beaucoup de collègues le franchissent à l'ouverture de leur cabinet. Les hôpitaux quant à eux, ménageront sans doute la chèvre et le choux: en coupant les manches plutôt que d'abolir la blouse. Certains, d'ailleurs, l'ont déjà fait...

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