Autour d'une urgence grave, il arrive que l'on se repose ainsi des questions qui sont en fait familières.
L'épidémie d'Ebola ne fait pas exception. Un des enjeux dont on a le plus parlé est le suivant: lorsqu'il n'y a pas de traitement dont l'efficacité serait prouvée, comment gérer l'administration d'un traitement dont on connait mal les effets? Quel degré de connaissance doit-on avoir sur une thérapie avant d'oser l'administrer à des personnes?
Lors d'une urgence sanitaire catastrophique, on peut avoir tendance à se dire que tout est bon à tenter. Mais la question reste en fait difficile. Certaines interventions font plus de mal que de bien, et ce serait bien sûr gravissime dans une épidémie pareille. Certaine interventions n'aident pas, et détournent du coup les efforts d'autres choses que l'on pourrait faire avec plus d'effet.
Sur ce point, l'OMS a publié des recommandations. Elles ont fait l'objet d'une discussion internationale très étendue et disent en substance:
- Il est licite d'administrer un traitement dont l'efficacité et les risques ne sont pas encore démontrés, si c'est fait de manière transparente et que la personne concernée et sa communauté sont d'accord.
- Il faut partager l'expérience qui en résulte. En d'autres termes, à mesure que l'on en sait davantage il faut que toutes les personnes concernées en sachent effectivement davantage.
- Idéalement, il faudrait faire de vraies études avec un protocole et une méthodologie solide, pour en savoir plus le plus vite possible.
Les traitements dont il s'agit en premier lieu n'existent qu'en très petite quantité et ne peuvent pas être produits à plus large échelle rapidement. On ne va donc pouvoir faire ni beaucoup de bien ni beaucoup de mal en les utilisant. Même s'ils s'avèrent très efficaces, ils seront d'un effet marginal simplement par manque. D'autres interventions sont cependant proposées. L'une serait de perfuser aux malades des anticorps prélevés chez les personnes ayant guéri. Cette intervention n'est pas non plus prouvée. On en connait un peu mieux certains de ses risques, mais cela reste expérimental. C'est semblable pour une autre question proche, mais pas identique: quel degré de connaissance doit-on avoir avant de tester un vaccin ? Là, il s'agirait d'administrer une substance encore peu connue à des personnes saines, mais à fort risque de développer une maladie grave. Là encore, la difficulté est d'estimer combien de connaissances sont nécessaires pour se permettre cela.
Cette question est difficile, mais elle n'est pas entièrement nouvelle en fait. On appelle 'essai thérapeutique' ou 'tentative thérapeutique' ces situations cliniques où l'on arrive au bout des thérapies démontrées, et où il y a des raisons de penser qu'une intervention supplémentaire pourrait apporter quelque chose mais sans que cela soit prouvé et sans qu'aucune étude en règle sur la question ne soit ouverte. Lorsqu'aucun traitement démontré existe, on admet qu'on a le droit de tenter la chose bien sûr. Mais il est très important d'être clair sur ce que l'on fait. Le patient qui consent à un tel traitement doit savoir qu'il n'est pas démontré. Il doit être d'accord. Le médecin doit estimer que ce n'est pas contraire à l'intérêt du patient. Que le traitement ne lui fera pas plus de mal que de bien.
Alors ici, sans doute aurait-il été préférable d'y réfléchir plus à l'avance. Après tout, même si on ne savait pas quand une épidémie allait frapper, on savait qu'elle frapperait tôt ou tard. Les propositions de l'OMS sur la question des traitements expérimentaux sont cependant raisonnables, et reprennent ce qui est recommandé dans ces cas.
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