Acquittement du Dr Bonnemaison: décryptages

Les media sont pleins de nouvelles sur des enjeux de fin de vie ces temps. Et l'un de ces cas est intriguant: l'acquittement par la Cour d'assises de Pau, en France, du Dr Bonnemaison. Il était accusé d'euthanasie sur sept patients et risquait selon la loi française la réclusion à perpétuité.

Comment se fait-il qu'un pays qui interdit, avec beaucoup de persistence, à la fois l'euthanasie et l'assistance au suicide finisse par acquitter un médecin qui aurait 'administré des médicaments ayant accéléré leur décès' à sept patients très malades et âgés, sans en référer à personne?

En fait ce n'est pas si surprenant. Sur la base des faits rapportés, il y a en fait deux lectures possibles et toutes les deux permettent de mieux comprendre.



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Billet d'invité: le Québec légifère sur l’aide à mourir

Un grand merci à Alex Mauron, qui nous fait cette fois un billet d'invité sur la nouvelle loi adoptée sur la fin de vie au Québec, qui soulève effectivement des enjeux intéressants. Je lui passe tout de suite figurativement la parole:


Après plus de quatre ans de travaux, l’Assemblée nationale du Québec a adopté un nouveau projet de loi légalisant l’aide médicale à mourir. Celle-ci est définie comme « un soin consistant en l’administration de médicaments par un médecin à une personne en fin de vie, à la demande de celle-ci, dans le but de soulager ses souffrances en entraînant son décès ». Une telle assistance pourra être obtenue par une personne atteinte d’une maladie incurable lui causant des souffrances insupportables. La demande, faite en connaissance de cause et en pleine conscience par une personne obligatoirement résidente du Québec, devra être avalisée par deux médecins. La nouvelle législation pourra se prévaloir d’une majorité massive puisqu’elle a été adoptée par 94 voix contre 22. Il est vrai que ce consensus politique sera d’autant plus nécessaire qu’une contestation de la loi au niveau fédéral est, selon les mots du premier ministre Philippe Couillard, « possible et probable ». Même si la loi inscrit l’aide à mourir dans le prolongement des soins en fin de vie et en particulier des soins palliatifs, la collision est inévitable avec le Code criminel du Canada. Car celui-ci condamne sévèrement l’euthanasie et l’assistance au suicide et les milieux conservateurs pro-vie ne manqueront pas d’attaquer la loi devant les tribunaux.

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Secret professionnel en prison: la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine

Les prises de position se poursuivent toujours. Maintenant, la Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine. Elle vient de devenir disponible dans les trois langues nationales ici. Je vous met le communiqué de presse et le lien, mais allez lire ce document en entier car les arguments sont comme toujours plus développés dans la prise de position entière. Ensuite, dites-nous ce que vous en pensez.

La Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine (CNE-NEK) publie aujourd’hui sa prise de position intitulée « Sur l’obligation de communiquer des informations couvertes par le secret médical en prison » (n° 23/2014). La CNE recommande à l’unanimité de maintenir le système actuel fondé sur une option de communiquer. Une obligation de communiquer ne facilite pas l’évaluation de la dangerosité et donc ne constitue pas un moyen d’améliorer la sécurité de la population ; cette obligation risque au contraire de péjorer cette sécurité, car les détenus ayant purgé leur peine réintégreront la société sans avoir bénéficié de soins adéquats, en particulier dans leur dimension psychique ; une obligation de communiquer tendrait de plus à décourager les médecins d’exercer leur métier auprès des personnes détenues, porterait une atteinte grave au droit à la sphère privée des personnes détenues et irait à l’encontre des principes éthiques internationalement reconnus. La CNE détaille ces considérations sur la base des arguments suivants qui s’opposent à l’obligation de communiquer :

• Le système actuel prévoit déjà de libérer les professionnels du secret médical dans des circonstances déterminées, notamment lorsqu’il s’agit de défendre des intérêts prépondérants qui priment sur le secret ou dans les cas d’urgence ;

• Les modifications envisagées confondent ou mélangent soin et expertise, alors que les activités de soins (prévention, diagnostic, traitement) doivent être strictement distinguées du travail d’expertise médicale. La séparation claire des deux rôles permet de préserver la spécificité des deux fonctions;

• L’obligation de communiquer nuit aux intérêts de la collectivité car la santé en milieu de détention sert également à protéger la collectivité, entre autres en diminuant le risque de récidive ;

• La confidentialité est indispensable pour instaurer une relation thérapeutique ; la confiance est au coeur de cette relation et de son efficacité ;

• L’obligation de communiquer contrevient aux principes de non-discrimination et d’équivalence, puisque les détenus doivent bénéficier de prestations dans le domaine de la santé similaires à celles offertes à l’ensemble de la population ; elle contredit ainsi les principes éthiques et déontologies régissant les professions de la santé ;

• Les modifications envisagées déplacent sans la résoudre la question du caractère pertinent de l’information à communiquer ;

• L’obligation de communiquer cible de manière indue une catégorie professionnelle, alors que les professionnels de la santé ne sont pas les seuls à disposer d’informations importantes ;

• Les modifications envisagées risquent de détourner les professionnels de la santé de l’exercice de la médecine en prison, les soignants ayant le sentiment d’exercer une catégorie inférieure de médecine où les exigences éthiques sont moindres.

On reparle du diagnostic préimplantatoire

Ici, vous savez qu'on en parle depuis un certain temps déjà. Je vous propose donc de relire à cette occasion les quelques articles que compte entre temps ce blog sur le sujet.  La Commission nationale d'éthique s'était également exprimée sur le sujet et sa majorité a recommandé la légalisation du diagnostic préimplantatoire, dans des limites spécifiées.  C'est en fait un projet de loi extraordinairement prudent qu'on nous propose ici. Certains le trouvent même tellement prudent qu'il ne changerait en pratique rien dans notre pays. Le DPI limité à huit embryons, comme le propose une des variantes en discussion, offrirait nettement moins de chances d'aboutir à une naissance vivante que les variantes pratiquées à l'étranger. Du coup, comme ce geste continuerait selon toute vraisemblance à être payé par les particuliers, les futurs parents continueraient à s'expatrier.

Ces précaution, ces limites, au nom de quoi les propose-t-on?

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