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Les dix plus grands enjeux moraux d'aujourd'hui?

Cette semaine je vous propose des questions avec quelques commentaires. La revue New Scientist a publié il y a quelques temps une série de petits articles examinant dix enjeux qui sont - peut-être - les plus importants de notre avenir proche. Qu'en pensez-vous?

Voici la liste:

1) Devrions-nous donner des droits aux animaux non-humains? Le commentaire: c'est compliqué, il y a différentes sortes de droits et ils ont une pertinence variable pour différentes espèces. Quels droits pour quels animaux?

2) Devrions-nous éditer le génôme de nos enfants? Si nous parvenions à le faire sans effets secondaires directs, il serait sans doute acceptable de le faire pour leur épargner des maladies sévères que nous traiterions sans hésiter après leur naissance. Dès que l'on va plus loin, dès que l'on s'éloigne de la thérapie pour aller vers des modifications qui s'apparentent davantage à de l'amélioration, cela devient nettement plus difficile. Par exemple, éditer le génome pourrait conduire à la disparition de certaines manières d'être humain. Un enjeu qui revient dans la question suivante:

3) Devrions-nous rendre tout le monde "normal"? Être conforme pourrait-être plus sûr, pour soi-même et pour les autres. Et nous avons des moyens de plus en plus puissants pour nous rendre plus conformes aux autres. Tentant? Non? Effectivement, cette perspective a aussi un côté terrifiant. Sur le plan individuel c'est clair. Et sur le plan collectif, en fait aussi: il n'est pas sûr que la conformité soit si bonne que ça pour nos groupes non plus. Une conférence intéressante à ce sujet, d'ailleurs, qui tourne autour de la non-conformité mentale qu'est le trouble du spectre autistique.

4) Devrions-nous abandonner la confidentialité en ligne? Ceux qui acceptent de sacrifier leur liberté pour la sécurité disait Franklin ne mérite ni l'une ni l'autre. Combien d'intrusion dans notre vie privée sommes-nous d'accord d'accepter aujourd'hui, et par qui?

5) Devrions-nous donner à des robots la possibilité de tuer? Cela semble absurde à première vue, si l'on a grandi au milieu de romans de science-fiction où des robots tueurs étaient une menace. Cependant, il arrive que nous soyons amenés à tuer: en guerre, ou dans les pays où la peine de mort est légale. Des robots pourraient être en mesure de le faire de manière mieux ciblée (insérer ici: moins de victimes civiles) ou plus équitable (moins d'innocents condamnés à mort). Deux objections à cela évidemment. Pour trouver qu'un robot qui tue de manière plus parcimonieuse est une bonne chose, il faut commencer par accepter la légitimité de tuer dans ces cas. Si on ne l'accepte pas, alors ce robot est une idée absurde, complice, immorale. La deuxième objection est qu'il est problématique de donner la possibilité de tuer à une entité qui n'est pas équipée d'un système moral. Pour le moment, donc, le consensus est assez clair: ce sera non.

6) Devrions-nous relâcher des formes de vie synthétiques dans la nature? Elles pourraient faire partie de la solution à de nombreux problèmes, capturer du CO2 et limiter le changement climatique, pousser dans des régions arides. Elles pourraient aussi avoir des effets difficiles à prédire sur les écosystèmes. Difficiles, OK, mais peut-être pas impossible cela dit. Si les risques sont prévisibles, peut-être qu'un jour ces organismes seront notre meilleur espoir pour des problèmes planétaires? Peut-être même que, si nous avons tort et que des super-plantes envahissent la planète, elles la préserveront mieux que nous...

7) Devrions-nous agir intentionnellement sur le climat?  Nous avons déjà agi sur le climat inintentionnellement en sortant les hydrocarbures du sous-sol pour en libérer les produits dans l'atmosphère. Devrions-nous le refaire, exprès cette fois, pour limiter les effet de nos actes passés sur le climat? Pour répondre à cette question, il faudrait prendre en compte que ces techniques ne marcheront peut-être pas, auront peut-être des effet secondaires, auront des impacts différents sur différentes régions du globe. Il faudrait aussi prendre en compte que les seules alternatives sont d'éliminer notre utilisation des énergies fossiles complètement d'ici à 2070, ou de vivre dans un monde qui n'aura plus rien à voir avec celui dans lequel notre espèce s'est adaptée, ou de trouver un monde alternatif. Mince, une question que pessimiste celle-là.

8) Devrions-nous imposer un contrôle du nombre de personnes dans le monde? En contrôlant les naissances, par exemple? Sur le plan écologique, il pourrait être raisonnable de le faire. Pas tant dans les pays pauvres, car même si les naissances y demeures plus nombreuses que dans les pays riches, l'impact écologique de chaque personne y est nettement plus bas. Limiter les naissances dans les pays riches, par contre, pourrait être très utile. Historiquement, on doit cependant constater que ce genre de politique a presque toujours favorisé des abus de pouvoir, parfois violents. En plus, on considère déjà maintenant trop souvent que le nombre de naissances est une responsabilité des femmes: si le nombre d'enfant devient un enjeu moral ce serait encore une raison, donc, de blâmer les femmes abusivement et ça aussi c'est un problème. Les inconvénients seraient-ils plus grands que les avantages? Ou bien peut-être est-ce la longévité qu'il faudrait limiter, ou du moins cesser de vouloir prolonger davantage? On voit bien les problèmes que cela pourrait poser.

9)  Devrions-nous coloniser d'autres planètes? Nous découvrons des exoplanètes, certes lointaines, mais la possibilité de les coloniser ne restera pas nécessairement entièrement théorique. Et si de la vie existait ailleurs? Aurions-nous le droit de la perturber, voir de la détruire? Selon la plus forte probabilité, il s'agirait de microbes. Sur terre, nous détruisons les microbes sans états d'âmes. Si nous détruisions des microbes ailleurs pour permettre aux humains d'y vivre avec un écosystème terrestre, aurions nous plus détruit ou plus créé? Les auteurs concluent que coloniser l'univers pourrait aussi poser problème si, après ne pas avoir préservé la terre, nous ne préservions pas non plus les mondes suivants où vivraient, peut-être, nos descendants. Devrions-nous donc renoncer pour des raisons de conservation galactique?

10) Devrions-nous arrêter de faire la science? La recherche scientifique nous apporte d'immenses avantages. Elle nous apporte aussi des risques, et des inconvénients. Des progrès scientifiques sont par exemple à l'origine de l'énorme croissance de la population mondiale et du changement climatique. Les avantages sont-ils suffisants pour accepter les risques et les inconvénients? Peut-être avons-nous eu de la chance jusqu'à présent, et qu'il serait prudent de s'arrêter pendant que nos gains sont plus importants que nos pertes. Mais peut-être que, justement, une grande partie de nos difficultés actuelles montrent que nous avons besoin d'apprendre plus de choses, de trouver de nouvelles solutions, et d'apprendre comment mieux appliquer celles que nous avons.

Ces questions sont difficiles. Mais bien sûr il est impossible de s'arrêter à ce constat pour simplement ne pas y répondre. D'une manière ou d'une autre, nous y répondons en permanence par une foule de choix que nous faisons, individuellement et collectivement. Comment, donc, améliorer nos choix et être confiants que l'amélioration en est vraiment une ? Vaste question que celle-là aussi.



Finalement: ces questions sont-elles les bonnes? Ce n'est certainement pas une liste complète des enjeux moraux de notre temps, ni un ordre objectif de leur importance. Quelles questions ajouteriez-vous dans la liste? Lesquelles enlèveriez-vous?

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CRISPR/Cas9

Plusieurs d'entre vous m'ont demandé ce billet. Il a un peu tardé, mais le sujet méritait un commentaire un peu plus long que d'habitude. Le voilà: n'hésitez pas à compléter dans les commentaires.

Pendant une vingtaine d'années, un consensus solide a entouré la manipulation génétique de la lignée germinale humaine: niet, rien à faire, l'interdiction est planétaire. Ceci, a-t-on dit en substance, est une une borne à ne jamais franchir.

Pourquoi ? Sur les raisons, le consensus est nettement moins important. Comme souvent lorsqu'il y a un accord très large sur une question, cet accord est en fait le résultat d'une convergence d'arguments différents. On est d'accord sur quoi faire, sans être pour autant d'accord pourquoi c'est cela qu'il faut faire.

C'est une des raisons pour lesquelles l'annonce d'un progrès net dans l'utilisation de la technologie d'édition génétique CRISPR-cas9 sur des embryons humains est si fascinante. En règlant un problème, ou du moins en offrant un progrès substantiel sur ce problème, elle donne l'impression de régler les problèmes. En fait, elle érode une des raisons du consensus. La question de la modification génétique de la lignée germinale s'en trouve à nouveau ouverte.

Quels sont les arguments en présence? Principalement, il y en a cinq. 

Premier argument, sans doute le plus visible: le génôme humain doit rester intangible car le modifier changerait en quelque sorte "l'essence de ce qu'est un être humain ». Dans cette optique, modifier le code génétique humain le transforme en quelque chose d'autre, de malléable selon nos désirs plutôt que fixe et faisant partie des données de départ de notre situation, d'artificiel plutôt que naturel. Ce à quoi touche l'être humain, dans cette optique, perd quelque chose d'essentiel en cessant litéralement d'être intacte. Est-ce un bon argument? Les avis divergent beaucoup sur ce point. Certains sont convaincus au nom d'un certain caractère sacré de la nature. D'autres rappellent que nous nous "réparons" nous-mêmes à tout bout de champs. Si vous vous cassez une jambe et que l'on vous l'immobilise, en est-elle pour autant devenue artificielle? Posée ainsi, la question peut sembler vaguement ridicule. Mais en fait il se passe quelque chose d'assez semblable lorsqu'une technologie de thérapie génique est utilisé pour guérir une maladie, donc restituer le génôme à l'état où il aurait été si cette maladie n'était pas survenue. Peut-être, du coup, y a-t-il en tout cas quelque chose de mieux défendable quand il s'agit de donner lieu à une configuration génétique qui existe par elle-même ailleurs? La question, on le voit, est très différente de l'enjeu avec lequel nous avions commencé. Et elle n'interdirait plus toute manipulation génétique d'embryons humains.

Autre argument: il s'agit de toucher à des embryons humains et nous n'avons pas le droit de toucher à des embryons humains. L'acceptation de cet argument dépend en grande partie des différentes position sur le statut de l'embryon. Décidément il faudra que je vous fasse un billet rien que pour ça dans pas trop longtemps. Le statut de l'embryon, évidemment, est un des enjeux qui divise le plus durablement les avis en éthique appliquée. Mais ici, il s'agirait après tout de traiter ces embryons. Même si ce point ne va pas se régler simplement, il est possible que certains défenseurs des droits des embryons soient en fait d'accord avec l'usage de cette technique: il pourrait s'agir un jour d'une forme de chirurgie très précoce, d'une manière de conduire vers la vie des embryons qui sans cela n'auraient pas été implantés.

Troisième argument: si des embryons modifiés sont ensuite développés jusqu'à leur naissance nous aurons modifié des personnes qui n'auront pas pu donner leur avis sur la question. Bon, vous me direz peut-être que les parents prennent inévitablement pour leurs enfants des décisions engageant leur futur sans que les enfants ne puissent encore participer à la décision. Certaines, comme le choix du lieu de domicile et de scolarité, déterminent l'identité future de l'enfant au moins autant que certaines modifications génétiques. OK, pourra-t-on répondre à ce stade, mais on n'autorise pas les parents à prendre n'importe quelle décision. C'est vrai. Dans de nombreux pays, dont la Suisse, on n'autorise typiquement pas les parents à prendre des décisions clairement dangereuses pour leur enfant. Cette limite n'est cependant pas définie de la même manière partout. Ici, il s'agirait donc de définir quelles décisions seraient autorisées aux parents et lesquelles seraient interdites, au nom du bien de l'enfant.

Quatrième argument : la possibilité matérielle et légale d'intrusion dans la ligue germinale humaine pourrait donner lieu à la recherche de « l'enfant parfait". Lors de la discussion sur le diagnostic préimplantatoire, cet argument était hors sujet. Ici par contre on est en plein dans la cible. En théorie, la panoplie des variants génétiques envisageables n'est plus limitée ici par le nombre d'ovocytes disponibles. En théorie à nouveau, donc, il pourrait cette fois devenir possible d'introduire n'importe quelle caractéristique dont les éléments génétiques seraient suffisamment connus et maîtrisés. Pas n'importe laquelle, donc: par exemple on ne connaît pas assez les éléments génétiques du talent musical ou de l'humour. En plus, de nombreuses caractéristiques génétiques semblent être interconnectées: il est donc possible que nous soyons définitivement incapables d'en modifier une sans affecter les autres. Mais tout de même ce serait un monde de possibilités qui s'ouvrirait là. Ces possibilités poseraient plusieurs types de problèmes. Les parents pourraient, beaucoup plus qu'à présent, déterminer l'identité de leur enfant. Nous venons de voir une des conséquences de cette possibilité : il faudrait pouvoir limiter ce pouvoir et en définir les contours pour que leurs décisions n'aillent pas à l'encontre du bien de leur enfant. Il y a plus, cela dit: les parents pourraient aussi faire des choix qui ne porterait pas tort à leur enfant, mais qui lui donneraient un avantage injuste sur des personnes n'ayant pas fait l'objet de modifications génétiques. Ces décisions iraient à l'encontre de notre reconnaissance les uns des autres comme des semblables biologiques, porteraient donc un tort profond à notre identité commune et à la cohésion de nos sociétés. Une question plus délicate, ça: quel degré d'inégalité biologique sommes-nous prêts à accepter? Et quel degré d'égalité biologique sommes-nous prêts à imposer? Ces questions, liées au futur de notre espèce, sont mises en avant par certains comme les plus importantes en lien avec la possibilité d'éditer nos gènes.

Finalement, modifier la lignée germinale veut dire prendre des risques très durables, sans en connaître la portée. Cet argument est de loin le plus consensuel. Introduire une modification précise et maîtrisée est une chose que nous n'avons jamais su faire. Introduire une modification approximative signifie toucher aux fondements génétiques d'une personne sans savoir tout ce qui va advenir. La personne en question devra ensuite vivre avec les conséquences sa vie entière. Si elle avait des enfants, elle pourrait en plus leur transmettre ces effets secondaires. Il n'y aurait pas de bonne manière de faire machine arrière dans le cas où un risque imprévu survenait.

C'est une très bonne raison de renoncer aux applications cliniques dans la vraie vie, ça. Mais justement, c'est cette raison que la technique CRISPR affaiblit. En permettant une correction génétique nettement plus précise et mieux maîtrisée, en permettant aussi une expérimentation plus rapide car moins chère, elle nous montre un futur pas si éloigné où l'on pourrait réellement n'introduire que la modification souhaitée et rien d'autre. Les progrès ont tout l'air d'être rapides. Il y a deux ans, une équipe chinoise faisait les gros titres avec une expérience sur des embryons humains non viables alors que leurs résultats principaux montraient qu'en fait ça ne marchait pas très bien. La semaine passée, une équipe américaine a nettement amélioré la technique et semble avoir obtenu presque un sans fautes. Un sans faute réel écarterait largement le risque direct lié à la manipulation génétique des embryons humains. Comme ce risque est l'argument le plus admis contre ces manipulations, la question s'en trouverait réouverte. Il ne resterait que les autres raisons qui, elles, font controverse.


On le voit, il y a parmi les raisons décrite ici certaines qui font aussi obstacle à la recherche sur la technique d'édition du génôme, et d'autres non. En fait, la question du risque lié à la technique est même une raison qui plaide en faveur de la recherche. Une meilleure connaissance du risque, et à terme une meilleure maîtrise du risque, passent par là. On peut donc vouloir plus de recherche sans pour autant se prononcer sur la nature des applications qui seraient admissibles à terme ou non. Pour cette raison, certains éthiciens se sont joints aux généticiens pour demander précisément cela. Des organismes officiels l'ont fait aussi, en donnant des raisons semblables.


D'autant plus que, pour être plus exacte, l'équipe qui vient d'annoncer ses résultats semble avoir véritablement obtenu un sans faute, mais avec une approche qui ne permet pas encore de dire si c'est vraiment le cas ou non. Le progrès le plus important rapporté par l'équipe américaine est la disparition du "mosaïcisme" dans les embryons traités à un moment spécifique de leur développement au stade d'une seule cellule. Lorsque l'on introduit une modification génétique dans une cellule, il arrive que lorsqu'elle se multiplie seulement certaines des cellules-filles portent cette modification. Le résultat est comme une mosaïque où coexisteraient différents sortes de pierres, d'où le terme de mosaïcisme. Si la cellule de départ est un embryon, alors l'individu qui en résulterait pourra quand même avoir la maladie que l'on avait cherché à extirper, même si parfois ce serait sous une forme atténuée. C'est ce problème qui semble avoir été éliminé. C'est un résultat impressionnant. Malgré cela, même si le nombre d'embryons examinés est relativement élevé (58), il reste assez modeste en fait car on pourrait ne pas avoir vu un risque rare. Pour compter sur cette méthode dans la vraie vie on voudrait avoir un seuil de sécurité encore plus élevé. L'autre risque que l'on craind lors d'une modification génétique est que la technique "se trompe" et que la correction ne soit pas seulement introduite à l'endroit du génôme que l'on vise, mais aussi ailleurs dans un ou plusieurs endroits qui ressembleraient à la cible. Là aussi, les chercheurs américains rapportent que leur approche n'a pas donné cette erreur, mais là le nombre d'embryon examiné n'est que de sept. C'est vraiment peu. Difficile de se dire que voilà, c'est bon, maintenant la technique ne fait plus d'erreurs.

En plus, leur résultat le plus intéressant est en fait une limite de plus au système. La technique qu'ils ont utilisée, le fameux CRISPR-cas9, est basée sur l'introduction d'une sorte de paire de ciseaux moléculaires capables de reconnaître le bon endroit où couper, et d'un modèle pour la pièce qui doit remplacer la partie extirpée. Mais les embryons qu'ils ont traités semblent avoir royalement ignoré ce modèle pour la pièce manquante. A la place, ils ont rempli le trou avec une copie du gène provenant de l'autre parent. Sur le plan scientifique, c'est une belle découverte: les embryons semblent avoir un système de correction génétique différent de celui des autres cellules. Sur le plan technique, cela pourrait être un problème: de nombreuses maladies génétiques ne sont dangereuses que si les deux copies du gène sont atteints. Il se pourrait donc que corriger ces situations-là soient plus difficile que prévu.

Dans ces conditions, donc, le risque est-il écarté? Ou plutôt est-il suffisamment écarté? Et puis, suffisamment écarté, qu'est-ce que ça veut dire? Les chercheurs qui rapportent ces résultats ne pensent clairement pas que nous soyons arrivés à ce point. Leur conclusion: c'est un progrès intéressant, mais il faudra encore pas mal de recherches et de vérifications avant de pouvoir même envisager d'utiliser cette technique dans la vraie vie. A la lecture de leurs résultats, on leur donne raison.

Nous avons donc du temps. Un temps qui ne sera pas de trop pour aborder les questions qui resteront une fois que la technique sera réellement devenue sûre. Plutôt qu'une controverse intense et brêve, nous allons avoir besoin d'une discussion prolongée et constructive. La plupart des arguments sont déjà là. Pour ce billet, tout ce que je vous ai dit résume des positions qui étaient déjà assez claires il y a vingt ans. Le jour où le risque aura vraiment radicalement diminué, nous n'aurons pas d'excuse si nous n'avons pas avancé sur les autres questions. A quel niveau le risque, une fois devenu bas, devient-il acceptable? Quelles sont les modifications que nous devrions interdire pour protéger les enfants futurs? Et quelles sont celles que nous devrions limiter pour éviter les risques qui pourraient atteindre nos rapports les uns aux autres? Ces questions étaient ouvertes depuis longtemps mais elles étaient en veilleuse. Si elles restent cette fois ouvertes, la suite pourrait être intéressante.

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Mes collègues: la vache parfaite, c'est quoi?





C'est un sujet cher aux Helvètes, pour toutes sortes de raisons. L'émission Vacarme a fait récemment une série sur l'usage de la génomique et du génie génétique pour améliorer les vaches. Améliorer, avez-vous dit? C'est quoi, ça, d'abord? Une vache qui donne plus de lait? Du meilleur lait? Qui survit mieux? Qui relâche moins de gaz à effet de serre? Qui est plus - allons, lâchons le mot - heureuse? Et si les vaches doivent être plus heureuses, c'est quoi exactement? Ma collègue, la philosophe Christine Clavien, a participé à l'émission. Ça vaut le détour.

Il y a quelques années, j'avais accompagné dans les Alpes un petit groupe de collègues venus en Suisse pour une semaine d'atelier. En traversant les alpages du Simmental, l'un d'entre eux était devenu de plus en plus silencieux, puis de plus en plus troublé: "J'ai rencontré des vaches heureuses!" s'était-il exclamé "j'ai toujours pensé que c'était une invention!" Avait-il raison? Certes, nous étions en été et les vaches étaient paisibles au milieux de l'herbe et des fleurs, face à des paysages pour lesquels un certain nombre d'humains est prêt à débourser des sommes certaines d'argent. Cela dit...c'est quoi, le bonheur d'une vache? Sommes-nous seulement capables de le déterminer? Jusqu'à un certain point sans doute, mais peut-être pas plus que tant. Nous sommes cela dit certainement capables d'identifier aussi jusqu'à un certain point le malheur d'une vache, et peut-être que cela suffit.

Et puis comment fait-on quand l'intérêt du paysan est poussé au point où il doit faire le choix entre l'intérêt de ses vaches et la survie de sa ferme? Pour avoir le beurre, jusqu'à quel point sommes-nous prêts à payer l'argent du beurre? Et si nous n'y sommes pas prêts, comment faire? Allez écouter, c'est intéressant. Et revenez nous dire ce que vous en pensez...

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Mes collègues: légalisons le diagnostic préimplantatoire

Le Temps a fait un chat pour toutes vos questions sur le diagnostic préimplantatoire. Nicolas Vuillémoz et Alex Mauron se sont prêtés à l'exercice, et le résultat est ici. Quelque extraits pour vous donner envie:

"Comment décide-t-on qu'une mutation doit être dépistée par DPI ou non? Comment fixer la limite éthique de la sélection d'embryon?
Les critères ne sont pas foncièrement différents de ceux du dépistage et du diagnostic génétique prénatal qui portent donc sur un fœtus et non un embryon. De plus, le DPI implique de travailler sur une quantité minime de matériel génétique, donc, la faisabilité d'un test donné devient un critère décisif, ce qui contribue à restreindre l'application du DPI par rapport aux analyses génétiques classiques. La sélection d'embryons est motivée par l'absence d'une maladie génétique bien précise pour laquelle le couple a des antécédents et aussi par l'absence d'anomalies chromosomiques qui entravent le développement de l'embryon pendant la grossesse. Les trisomies 21, 18 et 13 sont aussi dépistables à cette occasion, comme d'ailleurs au cours de toute grossesse normale. On est donc très loin d'une sélection d'embryons qui viseraient à éviter des handicaps mineurs, voir à favoriser des traits physiques considérés comme désirables. 
De plus, la nouvelle loi encadre la notion de maladie grave en précisant qu'il s'agit de maladies qui se déclarent tôt dans la vie et impliquent des souffrances importantes et des fardeaux particulièrement lourds. Pas question donc de dépister les futures personnes qui ont un risque accru de maladie d'alzheimer ou d'autres pathologies qui se déclarent à partir de l'âge mûr.

Dans les pays où il est autorisé, combien de couples en moyenne ont recours au DPI chaque année?
Nicolas Vulliémoz:
Nous disposons par exemple de données pour le Royaume-Uni, l'un des pays qui pratique le DPI depuis longtemps. Dans ce pays, 311 patientes ont eu recours au DPI en 2010 et 368 en 2011. Ce chiffre concerne les analyses sur les patientes porteuses d'une maladie génétique grave, comme la mucoviscidose.
Alexandre Mauron:
Le dépistage d'anomalies chromosomiques, c'est-à-dire non liées à une maladie monogénique (due à une mutation dans un gène particulier) peut faire augmenter le recours au DPI, mais de façon limitée car qui dit DPI dit fécondation in vitro et donc problèmes d'infertilité associés à des antécédents de fausses couches par exemple. Nul part, y-compris dans les pays les plus libéraux, il n'y a de DPI systématique chaque fois qu'il y a fécondation in vitro. Il faut des indications supplémentaires pour justifier le DPI comme dépistage des anomalies chromosomiques (dépistage des aneuploïdies). L'idée que des couples fertiles pourraient renoncer à faire des enfants selon la méthode traditionnelle et passer par la fécondation in vitro pour «sélectionner l'enfant parfait» relève du fantasme.


Bonjour, la question de l’eugénisme est certes mise en avant par les opposants. Pourtant, avec une loi plus large que le texte constitutionnel, n'y a-t-il pas un réel risque de sélection?
Il y a un malentendu sur le genre de sélections que le DPI rend possible. Ce qui a été présenté comme un élargissement de la loi par rapport au texte constitutionnel est motivé par le but d'augmenter le taux de succès de la fécondation in vitro. La sélection que le DPI rend possible est principalement celle d'embryons dépourvus d'anomalies majeures qui interrompront son développement bien avant la naissance. Le dépistage d'anomalies chromosomiques compatibles avec la survie, comme la trisomie 21, continuera d'être fait par les méthodes de dépistage prénatal classique qui s'adressent à toutes les femmes enceintes.
L'analogie avec l'eugénisme d'antan ne tient pas parce que celui-ci visait un effet sur la population en général et se servait de mesures autoritaires, comme la stérilisation des «indésirables». On est très loin des instruments actuels de diagnostic qui servent à donner aux femmes et aux couples un choix face à la perspective d'une maladie grave de leur enfant. Parmi toutes les méthodes d'analyse génétique existantes, le DPI est au fond celle qui a le moins de potentiel eugénique, précisément parce qu'elle est ciblée sur des catégories minoritaires de personnes, à savoir les couples qui ont des antécédents d'une maladie génétique précise et les couples infertiles qui ont une histoire clinique de fausses couches ou d'autres problèmes survenant au cours de la grossesse.

Bonjour, est-ce que le DPI permet de savoir si son enfant va voter à droite ou à gauche plus tard? Ou d'abord à gauche puis à droite et inversement? Merci de vos lumières scientifiques. G.
On se fait beaucoup d'illusions sur le pouvoir prédictif de l'information génétique. La génétique humaine est née de la médecine et elle est donc surtout bonne pour identifier les gènes impliqués dans des maladies. Elle est faible quand il s'agit d'identifier la base génétique éventuelle de traits de comportement. D'autant plus que ces traits de comportement sont souvent le résultat d'une interaction immensément complexe entre le génome, l'environnement et la biographie des personnes. Donc non, le DPI, ni la génétique en général ne permettront jamais de faire une telle prédiction."

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Le dépistage non invasif de la trisomie 21

J'ai écrit récemment un billet sur un enjeu qui va nous accompagner ces prochaines années. Il est désormais possible de réaliser un dépistage, un test pour savoir si un risque existe ou non, de la trisomie 21 en testant directement l'ADN fetal qui se trouve dans le sang maternel. D'un côté, c'est un progrès. D'un autre, c'est aussi une possibilité qui permet peut-être des choix risqués.

Voici comme d'habitude le texte et le lien:

"Avant de me confier mes premières consultations prénatales, on m’avait soigneusement appris toute une série de choses. Parmi elles, le diagnostic de la trisomie 21. Dans le scénario typique, la grossesse était débutante et la consultation servait d’abord à la confirmer. Lorsqu’il s’agissait d’un événement heureux, c’était le moment du sourire au coin des yeux et des rêves tout roses. Et puis…et puis il fallait demander : En cas de trisomie 21, que feriez-vous ? Grand virage, là. On aurait presque vu les chaussons tricotés par la grand-mère virer aux images métalliques d’amniocentèse dans le regard intérieur des futurs parents. Mieux valait ne pas poser la question de but en blanc ; mais ce virage n’était pas entièrement évitable.

Le dépistage comportait déjà à cette époque une étape initiale dont le résultat était un rapport de probabilité. Inférieur à 1/200, le test était considéré comme négatif. Ce seuil atteint, l’amniocentèse était considérée comme indiquée pour les parents qui souhaitaient connaître le diagnostic. Arrivés à ce stade, il n’était cela dit plus vraiment temps de se demander si l’on voulait savoir ou non. Même pour ceux qui n’avaient pas déjà décidé d’interrompre en cas de trisomie, l’incertitude devenait souvent plus pesante que le risque lié à la ponction. Pour réfléchir posément, il fallait se poser la question avant le test initial. D’où la question durant la première consultation ; d’où le virage serré de cette fameuse conversation.

Cette conversation ne semble jamais avoir été une attitude établie pour tous. Ce n’est pas vraiment surprenant. Le test est après tout rassurant dans la majorité des cas : on peut comprendre que des confrères hésitent à troubler à ce point des futurs parents heureux. Une explication qu’un certain nombre de tests sont habituels en début de grossesse pour ‘vérifier que tout va bien’ tient lieu de consentement éclairé, et lorsque les résultats sont rassurants ça passe comme une lettre à la poste. Le hic, c’est évidemment que parfois ce n’est pas le cas. Pour ces couples-là, le moment d’une décision libre et réfléchie est alors passé avant d’être arrivé.

C’est dans ce scénario qu’arrive le dépistage non invasif de la trisomie 21, rendu possible par une analyse de l’ADN fœtal dans le sang maternel et dont la couverture par l’assurance maladie a été acceptée cet été. Que va-t-il changer ? En ajoutant à la précision du test initial, il va permettre de diminuer le nombre d’amniocentèses. Un progrès. En faisant intervenir un test ADN avant le stade invasif, il va introduire dans cette étape du dépistage les exigences qui accompagnent les analyses génétiques humaines, entre autres celle d’un conseil non directif, d’une vraie information. Là aussi, c’est un progrès.

Pourtant, ce test a fait controverse. Pourquoi ? En augmentant l’efficacité du dépistage de la trisomie 21, certains craignent que l’on n’améliore « l’efficacité » avec laquelle on empêchera dorénavant la naissance d’enfants atteints de trisomie. La crainte est ici également que ce ne soit justement ce que nous souhaitons faire.

La réalité est cependant que le test non invasif ne va pas limiter le nombre de personnes qui naîtront avec une trisomie 21. Ceux qui procèdent aujourd’hui à la démarche diagnostique continueront de le faire, avec à la clé un risque plus faible d’avoir besoin d’une amniocentèse. Ceux qui ne veulent pas savoir continueront de ne pas initier le processus. Avec l’addition d’un test génétique on peut même espérer que la décision des couples sera mieux réfléchie, et aura lieu dans de meilleures conditions. La crainte de ce test est donc exagérée, tout comme l’espoir (réel ou supposé) contre lequel cette crainte réagit. Un peu comme si nous étions des enfants, qui auraient peur de leur ami imaginaire… "

Que la crainte de cet outil technologique soit déplacée, cela ne veut pourtant pas dire que toute crainte est déplacée. Ces choix se font dans un contexte. La trisomie 21, cela fait très peu de temps par exemple que c'est reconnu comme un handicap congénital. Ne pas le reconnaître, c'est mettre les parents devant des obstacles évitables. C'est leur rendre plus difficile l'accès aux aides dont ils seront nombreux à avoir besoin, et dont leurs enfants seront nombreux à avoir besoin eux aussi pour mener une existence qui soit la meilleure possible. C'est sans doute aussi influencer leur choix devant un résultat positif lors d'un dépistage. Dans notre fascination pour les progrès technologiques, il est bon que nous n'oublions pas d'examiner aussi et parfois de corriger ce genre de chose...

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Éditer le génome des embryons?


Sur la question des embryons humains génétiquement modifiés par des chercheurs chinois, il y a forcément un peu plus à dire que le temps qu'on vous donne aux nouvelles. Du coup (je soupçonne ici que ce n'est pas seulement moi) on sort un brin frustré. Voici donc quelques commentaires en plusde la video et quelques explications.

La première chose qu'il faut savoir, c'est que la technique utilisée commence par couper dans le génome avant d'y insérer un gène corrigé. Elle été inventée par deux femmes pour une application chez les bactéries, mais en fait la technique peut en théorie être utilisée dans n'importe quelle cellule.

Et là, des chercheurs de l'Université Sun Yat-sen University à Guangzhou ont pratiqué une expérience pour voir ce que cela donnerait sur des embryons humains.

La deuxième chose à savoir, c'est que cela n'a pas très bien marché. Certains embryons n'ont pas survécus, d'autres n'étaient pas modifiés, ceux qui l'étaient n'avaient souvent pas la modification attendue. Si cette expérience a montré quelque chose, donc, c'est d'abord à quel point la technique est immature.

La troisième chose qu'il faut savoir, c'est que cela fait un certain temps que la manipulation génétique des embryons humains est considérée comme quelque chose qu'il ne faut absolument pas faire. Pourquoi? Parce que si l'on procède à une manipulation génétique sur un embryon humain et que tout ne se passe pas exactement comme prévu, alors le risque est énorme. Si cet embryon est implanté, se développe et arrive jusqu'au terme d'une grossesse, bref devient une personne comme vous et moi, alors cette personne devra subir toute sa vie d'éventuels effets secondaires. Ce fardeau risque en plus d'être ensuite transmis aux générations futures.

Le résultat, c'est qu'un certain nombre de pays ont tout bonnement interdit la manipulation génétique germinale : celle qui touche aux cellules reproductives. En Suisse, l'article 119 de la Constitution fédérale stipule entre autres que "toute forme de clonage et toute intervention dans le patrimoine génétique de gamètes et d'embryons humains sont interdites".

Ici cependant, non seulement ces embryons n'ont pas été implantés mais ils n'auraient pas pu se développer jusqu'à terme. Les risques n'auraient donc existé ni pour une personne future ni pour les générations futures.

La quatrième chose à savoir, c'est que sur la base des craintes soulevées par la manipulation génétique des embryons humains, la communauté scientifique est en plein appel au moratoire. Des éditoriaux parus coup sur coup dans Nature et Science ont appelé à la prudence, et à ce que la communauté scientifique s'abstienne pour le moment de certaines applications de cette technologie. Et c'est bien le hic: c'est au milieu de ces appels et avant qu'une décision n'ait été prise que cette expérience a été publiée.

La réaction ne s'est pas faite attendre (par exemple ici, ici, ici) En attendant cependant, il semble que d'autres groupes soient prêts à emboîter le pas et à chercher à améliorer la technique. La communauté scientifique, qui s'est déjà imposé des moratoires dans le passé, va-t-elle être en mesure de définir et d'implémenter une limite dans ce cas? Cela ne sera peut-être pas suffisant, mais ce serait déjà pas mal. Car c'est finalement un test, que ce cas. Sur les dernières décennies, la communauté scientifique s'est beaucoup décentralisée. Va-t-elle néanmoins être capable de décider d'un moratoire et d'en définir les paramètres? Le Dr Baltimore, un des auteurs d'appels au moratoire, dit compter pour cela sur l'autorité morale des États-Unis. Sans doute voit-on cela d'un autre œil en Chine. Mais alors comment faire, dans un monde devenu si multilatéral? Ce n'est pas seulement un enjeu éthique qui se joue là. C'est un cas d'espèce où l'on sent bouger les rapports de pouvoir du monde.

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Analyses génétiques et calcul des risques

La radio nous en informe ce matin: des caisses maladies lancent une demande pour obtenir les données génétiques des personnes qui souhaitent contracter auprès d'elles une assurance complémentaire.  La nouvelle aurait été relayée par la NZZ am Sonntag, mais là je n'arrive pas à trouver le lien donc je renonce: soyez gentils et mettez-nous le lien si vous le trouvez.

C'est une question intéressante, au fond. On sent bien qu'il y a un problème, mais où est-il exactement? Dans le danger pour le secret médical? Pas vraiment: c'est le patient qui révèle son information et il en a toujours le droit. L'assureur n'a pas le droit d'exiger cette information, certes, mais comme il n'a pas non plus l'obligation d'accepter qui que ce soit dans l'assurance complémentaire il aura beau jeu d'échanger l'accès à l'assurance contre l'accès aux données. La raison avancée semblerait même relativement raisonnable: si un client potentiel connaît son patrimoine génétique, et qu'il le cache à l'assureur, alors il y aura entre eux une asymétrie d'information et c'est problématique.

Alors où est le problème? D'abord peut-être, on aimerait que cette symétrie d'information aie la même importance quand l'asymétrie va dans l'autre sens. Mais plus fondamentalement, il s'agit ici de donner aux assureurs les moyens de mieux préciser le risque d'une personne. Et ici, si on est gêné, cela mérite un commentaire. Car cerner et chiffrer le risque est en quelque sorte le métier des assureurs. C'est leur compétence, leur savoir-faire, leur raison d'être. Dans la plupart des formes d'assurances, ils s'en servent pour stratifier le risque. Si vous avez une voiture chère à réparer, tout le monde trouve parfaitement normal que vous payez plus cher votre assurance pour cette voiture.

Mais c'est là que le bât peut commencer de blesser. Car dans l'assurance maladie, on ne trouve pas normal de payer plus cher son assurance si on a un corps plus cher à soigner. La solidarité joue, nous devons tous avoir accès aux mêmes soins sur la base de notre prise en charge collective du risque pour notre santé. Notre fragilité biologique commune, notre soutien à l'idée que notre futur doit rester ouvert, tout cela concorde à nous faire prendre en charge collectivement, et solidairement, les soins de santé.


Mais minute, direz-vous... Çà, c'est la logique de l'assurance de base! Dans l'assurance complémentaire, justement, les caisses ont parfaitement le droit de préciser et de stratifier les risques. L'assurance complémentaire, justement, n'est pas censée donner accès à des soins nécessaires et qui ne seraient pas accessibles dans l'assurance de base. Aucun problème, donc. C'est juste un jour de travail comme les autres, circulez il n'y a rien à voir!
Pourquoi, dès lors, sommes-nous inquiets? C'est peut-être parce qu'une nouvelle comme celle-là nous rappelle que ce n'est que dans l'assurance de base que nous avons tous accès aux mêmes prestations. Elle nous rappelle aussi qu'être exclu de l'assurance complémentaire est une loterie. Il est parfaitement possible d'avoir les moyens de s'assurer au meilleur niveau, et puis ooops....plus possible parce que l'an dernier j'ai envoyé par curiosité cet échantillon à une succursale de google qui m'a informé sur mes risques génétiques.

Du coup, c'est peut-être justement là qu'est l'aspect le plus intéressant de cette nouvelle. A chaque fois qu'on nous rappelle que l'assurance complémentaire peut devenir hors de portée, on nous rappelle aussi que notre futur dépendra un jour de la solidité de l'assurance de base. On nous rappelle aussi que nous sommes, finalement, dans le même bateau sur ce chapitre. Quels que soient nos moyens financiers.

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Diagnostic préimplantatoire: questions stratégiques

Le débat se poursuit aux chambres fédérales sur le diagnostic préimplantatoire. La situation est actuellement la suivante:

Pour rappel, sous l'angle technique, le diagnostic préimplantatoire c'est une méthode pouvant être utilisée lors de la fertilisation in vitro, qui permet d'analyser quelques caractéristiques génétiques d'un embryon très précoce, avant de l'implanter...ou non.

Toujours pour rappel, sous l'angle humain, le diagnostic préimplantatoire est une méthode qui permet à des couples frappés lourdement par une maladie génétique grave, à des personnes qui ont parfois déjà perdu un enfant, parfois plusieurs, de donner la vie malgré cela sans devoir à nouveau traverser les mêmes épreuves.

En Suisse, actuellement, ce geste est interdit. Cela pose problème, car une des conséquences est que  les couples frappés par une maladie génétique grave et qui souhaite avoir un enfant malgré cela doivent passer par une "grossesse à l'essai". Concevoir un enfant, attendre pour pratiquer un diagnostic prénatal -qui est autorisé- tout en sachant que si la maladie est présente ils avorteront à ce moment et recommenceront.


Le Conseil Fédéral a proposé de légaliser le DPI, ce qui viserait à résoudre ce problème. Il s'est cependant positionné de manière vraiment très prudente. Si prudente, en fait, que le projet proposé aux chambres risquerait de rendre le DPI légal sans le rendre véritablement réalisable en Suisse. Il est par exemple proposé de limiter à huit le nombre d'embryons que l'on pourrait développer à chaque fois pour tester la présence de la maladie et en implanter un qui ne serait pas atteint. Selon les experts, cela aurait pour effet de rendre non rentable la pratique du DPI en Suisse. Les taux de succès ne feront simplement pas le poids par rapport à l'offre disponible à l'étranger. On autoriserait donc, mais virtuellement seulement.
 Cette position très prudente a été suivie par le Conseil des Etats. Il a également suivi le Conseil Fédéral sur le projet d'interdire les diagnostics de trisomies. Il l'a encore suivi en acceptant d'interdire l'analyse des embryons pour la compatibilité HLA en cas de maladie d'un frère ou d'une soeur: ce que l'on appelle parfois le 'bébé sauveur'. Il a finalement interdit l'accès au DPI à tous les couples ayant recours à la fertilisation in vitro pour en limiter l'accès aux couples qui savent qu'une maladie héréditaire grave est présente dans leur famille.

Le Conseil national, lui, a vu les choses autrement. Sa proposition est de ne pas limiter dans la loi le nombre d'embryons que l'on pourrait développer. Ce nombre serait ainsi fixé par les limites biologiques (on ne fait pas un nombre infinis d'ovocytes par cycle, même sous stimulation), et par les règles de l'art médical. Il a aussi proposé d'autoriser le diagnostic des trisomies.

Alors maintenant, quoi? De toute manière, le peuple va à la fin devoir voter car il y a un changement constitutionnel à la clé. La discussion se trouve maintenant en résolution des différences, mais à la fin la décision porte sur quel texte soumettre au peuple. Un texte plus prudent, sans doute, aurait de meilleures chances de passer. On aurait ainsi légalisé le DPI, dans un cadre extrêmement strict. Un texte permettant réellement la pratique du DPI, en revanche, ne pourrait pas être aussi restrictif. Le vrai risque n'est donc sans doute pas de se retrouver à la case départ. Le vrai risque, cela pourrait être de proposer la prudence par souci de compromis, pour se retrouver ensuite avec un texte strictement symbolique, qui ne satisferait personne, et qui bloquerait la situation pour au moins une décennie...

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On reparle du diagnostic préimplantatoire

Ici, vous savez qu'on en parle depuis un certain temps déjà. Je vous propose donc de relire à cette occasion les quelques articles que compte entre temps ce blog sur le sujet.  La Commission nationale d'éthique s'était également exprimée sur le sujet et sa majorité a recommandé la légalisation du diagnostic préimplantatoire, dans des limites spécifiées.  C'est en fait un projet de loi extraordinairement prudent qu'on nous propose ici. Certains le trouvent même tellement prudent qu'il ne changerait en pratique rien dans notre pays. Le DPI limité à huit embryons, comme le propose une des variantes en discussion, offrirait nettement moins de chances d'aboutir à une naissance vivante que les variantes pratiquées à l'étranger. Du coup, comme ce geste continuerait selon toute vraisemblance à être payé par les particuliers, les futurs parents continueraient à s'expatrier.

Ces précaution, ces limites, au nom de quoi les propose-t-on? Certaines sont entièrement raisonnables. Autoriser le DPI pour dépister une caractéristique génétique, OK, mais seulement si c'est un marqueur de maladie grave. Oui, c'est important: on ne voudrait pas autoriser le choix de la couleur des cheveux, de la taille à l'âge adulte.

D'autres arguments sont moins solides. Parmi eux, la crainte souvent exprimée que choisir un embryon plutôt qu'un autre pourrait exprimer que l'autre ne méritait pas de vivre. Cela pourrait aussi, craignent certains, nous décourager de faire des efforts pour rendre nos infrastructures plus faciles pour les personnes handicapées, par exemple. Ou de voir comme une richesse la diversité humaine que certains handicaps complètent. C'est une des raisons pour lesquelles les militants pour les droits des handicapés se sont souvent exprimés contre le DPI. Mais même si tout ça est important, le lien avec la possibilité ou non de pratiquer le DPI est très distant. Serions-nous vraiment plus ou moins capables de respecter nos semblables et de leur faire une place adaptée, simplement parce que quelques personnes auront réalisé une analyse génétique sur leur embryon? Il est de toute manière important défendre ces valeurs, et c'est en fait de cela qu'il s'agit et non du DPI. 

Finalement, restent les soucis habituels pour la protection des embryons. C'est en fait apparemment l'enjeu central pour la plupart des opposants au projet. Un jour, c'est promis, je vous ferai un message de résumé des positions sur le statut moral des embryons humains. Mais en attendant, un défi que j'avais lancé il y a quelques temps tient toujours car je n'ai eu aucunes réponses. Je vous le livre donc à nouveau.

Disons que, juste pour aujourd'hui et pour les besoins de cette discussion, les embryons méritent comme certains le pensent la même protection que vous et moi. Acceptons cela, pour explorer l'étape suivante du raisonnement. Car ces embryons auxquels nous venons de reconnaître pour cette discussion le statut d'êtres humains à part entière, contre quoi, exactement, l'interdiction du DPI les protègerait-elle? Contre la privation d'un avenir à l'état de quelques cellules, congelé dans l'azote liquide? Contre une 'indignité' diront certains,  mais laquelle exactement? Contre une existence de quelques jours sans souffrance ni conscience? Si vous pensez que cette protection-là est suffisamment importante pour justifier une interdiction, dites-nous pourquoi dans les commentaires. Je suis intéressée. Ce qui frappe ici, c'est surtout à quel point nos schémas peuvent être trompeurs. Quand on pense à un embryon, c'est parfois comme si on pensait à un tout petit-très très petit- bébé, qui allait devenir un jour un enfant puis un adulte. On pense au début d'une histoire, à l'alternative de naître. Mais dans la réalité un grand nombre d'embryons ne naîtront jamais même lorsqu'ils auront été conçus 'naturellement'. Et si l'on estimait important de leur épargner ce 'sort', on devrait alors songer à arrêter de faire des enfants...


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Billet d'invité: Born this way (hommage à Lady Gaga)

Merci une fois de plus à Alex Mauron, qui nous refait un billet d'invité. Cette fois c'est un sujet qui revient à l'actualité et qui a vraiment besoin d'éclaircissements:

La question des causes biologiques de l’homosexualité suscite une fascination durable chez beaucoup de gens, surtout parmi nos concitoyens à la haute stature morale qui, comme disait Mencken, sont hantés par la crainte que quelqu’un, quelque part, pourrait avoir du plaisir. Il est donc logique que la controverse du « gène gay » réapparaisse régulièrement dans l’actualité. La dernière itération en est l’opération de relations publiques menée il y a quelques jours par des chercheurs de Chicago autour de travaux sur la corrélation entre l’homosexualité masculine et certaines régions des chromosomes 8 et X. Ces résultats, présentés dans le congrès annuel 2012 de l’American Society of Human Genetics, ne sont toujours pas parus dans un journal scientifique à peer review. Qu’à cela ne tienne, ont dû se dire les chercheurs, qui ont participé à une manifestation de vulgarisation scientifique opportunément agendée pour la Saint-Valentin et calibrée pour susciter le buzz médiatique. Et buzz il y eut. Le Daily Mail du 14 février titre: « Etre gay, c’est dans vos gènes, affirment des scientifiques dans une nouvelle étude sur l’ADN », qui ajoute doctement que « cela renforce l’idée que l’homosexualité est affaire de biologie et non de choix ». Vous penserez peut-être que ce sont les journalistes incultes qui simplifient tout abusivement. Alors voyons ce que déclare au Daily Mail l’investigateur principal de l’étude, le psychologue Michael Bailey de la Northwestern University : « L’orientation sexuelle n’a rien à voir avec un choix. Nos résultats montrent que les gènes entrent en jeu puisque deux groupes de gènes influencent le fait qu’un homme est hétéro ou gay. » Il s’empresse d’ajouter que le développement d’un test prénatal sera difficile vu le nombre de gènes impliqués (nous voilà rassurés. Ou bien ?).

En fait, le gène gay, c’est une vieille histoire. En 1993, Dean Hamer publiait des résultats impliquant déjà la même région du chromosome X dans l’orientation sexuelle masculine. A l’époque, ces données tombaient en plein dans une controverse politico-morale. Pour la droite conservatrice, l’idée que l’homosexualité soit génétique, c’est-à-dire inévitable, était trop affreuse pour être vraie car cela démentait la croyance selon laquelle l’homosexualité est un style de vie immoral et exonérait les gays de toute culpabilité, sans compter qu’elle ôtait leur plausibilité aux « thérapies de conversion » censées changer l’orientation sexuelle vers la normalité hétéro et qui persistent à être prônées aujourd’hui dans les milieux chrétiens fondamentalistes. A l’inverse, les mouvements américains de défense des gays ont souvent embrassé la théorie du déterminisme génétique de l’homosexualité masculine, car elle place la discrimination homophobe dans le même registre que la discrimination raciale : il s’agirait dans les deux cas d’un traitement injustement différent des personnes sur la base d’une caractéristique biologique qui ne relève manifestement pas d’un choix de l’individu concerné. Avec du recul, ce choix tactique apparaît assez malheureux, car le fait de désigner l’homosexualité comme une fatalité biologique complique peut-être sa condamnation morale mais cela n’exclut absolument pas de la traiter comme une pathologie. Or qui dit pathologie dit thérapie et/ou prévention. Du même coup, on retombe sur les funestes pratiques d’évitement de l’homosexualité par des parodies de psychothérapie, voire le dépistage génétique prénatal… mais ce dernier est heureusement une chimère.

Il est frappant de voir comme la réception sociale de ce genre de recherches en génétique comportementale humaine est complètement surdéterminée par des positions idéologiques, d’ailleurs souvent contradictoires : sur le « gène gay », les défenseurs de droits des gays étaient pour, la droite religieuse était contre. Mais rappelez-vous les controverses plus anciennes sur l’hérédité de l’intelligence: la droite était pour (il faut bien que les riches puissent croire que leurs talents innés expliquent leur bonne fortune), la gauche était contre (si la nature humaine est trop contrainte par des déterminations biologiques, comment changer la société ?). Souvent les chercheurs concernés lèvent les bras au ciel en clamant qu’ils ont été mal compris, mais ce sont parfois les premiers à se faire mousser en suggérant ces interprétations génératrices de grands frissons. Comme si ce domaine de recherche se devait absolument de fournir des résultats soit spectaculaires, soit terrifiants. Ou les deux, c’est encore mieux.

Cette surdétermination de controverses scientifiques sur l’hérédité par des agendas politiques est une constante, y compris parmi certains scientifiques, comme l’illustre une brève histoire des idées en matière d’hérédité de l’homosexualité (un peu ancienne mais encore utile) qu’on trouve ici. Essayons donc de mettre entre parenthèses ces implications politiques supposées et de décortiquer l’état de la question: alors, l’homosexualité, c’est les gènes ou c’est l’environnement ? Les deux, mon général, et on peut conclure sans risque de se tromper que l’orientation sexuelle dépend à la fois de la génétique et de ce machin polymorphe appelé « environnement ». Depuis les années cinquante du siècle dernier, des études sur les jumeaux ont mis en évidence la probabilité accrue pour le frère jumeau monozygote d’un homosexuel de l’être aussi. Mais ces recherches étaient entachées de problèmes méthodologiques, liés entres autres au présupposé discutable que l’hétérosexualité représente l’option « par défaut » de l’orientation sexuelle. Néanmoins les études de jumeaux les plus récentes semblent nettement plus solides et confirment l’existence d’une composante génétique relativement importante dans l’orientation sexuelle, du moins chez les hommes (revue et références ici), l’homosexualité féminine étant probablement assez fondamentalement différente. L’héritabilité de l’homosexualité masculine se situe dans une fourchette de 39 à 48%, ce qui veut dire que dans les populations étudiées, environ 40% des différences d’orientation sexuelle sont explicables par des différences génétiques.

Trouvaille spectaculaire ? Pas vraiment, et cela pour de nombreuses raisons. D’abord, l’héritabilité est un concept populationnel, qui ne permet pas de tirer des conclusions sur les individus. L’héritabilité mesure la corrélation entre la diversité d’un phénotype (c’est-à-dire d’une certaine caractéristique des individus, en l’occurrence l’orientation sexuelle) et la diversité génétique de la population. L’héritabilité d’un phénotype peut changer si la composition génétique de la population change, ou que des variables environnementales pertinentes changent aussi. Le cas classique, c’est l’héritabilité de la taille. Dans les populations non précarisées des pays riches, la taille des enfants devenus adultes ressemble beaucoup à celle de leurs parents; l’héritabilité est très élevée, de l’ordre de 80%. Est-ce à dire qu’un mécanisme génétique inflexible détermine la croissance des enfants de façon prépondérante, ne laissant qu’un rôle tout à fait mineur à l’environnement et en particulier l’alimentation ? Évidemment non, et pour s’en convaincre il suffit de considérer l’héritabilité de la taille à d’autres époques ou chez des populations moins prospères d’aujourd’hui, qui est nettement moindre. Une explication plausible est que chez nous, la grande majorité des enfants ont une alimentation suffisante – voire plus - et sans carences majeures. Du même coup, la variable « nutrition » n’est plus tellement variable justement; et comme elle est fixée à un niveau relativement optimal, les différences de taille vont surtout refléter la variabilité génétique, à savoir des différences dans les propensions génétiques à être plus ou moins grand. Puisque la variabilité de l’environnement est faible, les effets de la diversité génétique sont plus marqués. Le fait que la taille donne l’impression d’être essentiellement génétique plutôt qu’environnementale est en fait dû… à l’environnement! Il y a encore d’autres raisons qui rendent l’estimation et l’interprétation de l’héritabilité chez l’être humain particulièrement compliquée comme expliqué dans cet article (pour les geeks).

Revenons à l’héritabilité de l’orientation sexuelle. Qu’un homme soit gay ou hétéro, ça n’a pas de sens de dire que les gènes y sont pour 40% et tout le reste pour 60%. Ça n’a pas non plus de sens de dire que l’orientation sexuelle masculine est à 40% fixée une fois pour toutes (« innée ») et à 60% malléable en fonction de facteurs extérieurs à la personne considérée et sur lesquelles on pourrait en principe intervenir (« aquise »). On touche ici du doigt le malentendu le plus fondamental et qui plombe pratiquement toutes ces controverses. C’est l’erreur qui consiste à plaquer sur la distinction hérédité/environnement une notion d’inévitabilité ou au contraire de changement possible. Car il y a un raccourci fautif dans l’air du temps selon lequel si c’est les gènes, on n’y peut rien, si par contre c’est l’environnement, on peut intervenir (de quelle manière est une autre question). Or pour des traits humains complexes, sous la dépendance simultanée de plusieurs gènes et de facteurs environnementaux, l’héritabilité ne permet de tirer aucune conclusion a priori sur l’efficacité d’interventions extérieures. La notion de fatalité génétique, qui hélas est souvent proche de la vérité pour les maladies génétiques mendéliennes dont s’occupe la génétique médicale, n’est pas pertinente ici.

Ce contresens une fois identifié, on voit que les controverses politico-morales que nous évoquions sont bâties sur le sable. On croit parler de biologie alors qu’en fait on parle de déterminisme et de libre arbitre, ainsi que de pratiques sociales et culturelles modelant les comportements de façon plus ou moins impérieuse; et on oublie souvent que les conditionnements éducatifs et sociaux peuvent être aussi contraignants que les gènes. Enfin, il y a ce bon vieux paralogisme naturaliste qui pointe le bout de son nez et nous fait oublier qu’on ne peut pas benoîtement tirer des conclusions normatives des schémas descriptifs et explicatifs que fournissent la biologie, la psychologie et les sciences sociales. Le faux débat sur l’homosexualité faute ou pathologie s’est bien estompé, du moins dans le monde occidental et cela ni à cause, ni malgré les résultats de ces recherches. Et si la persécution des homosexuels est encore si répandue, voire en progrès dans de nombreuses régions du monde, cela n’est pas affaire de science, mais bien d’obscurantisme moral et de bourrage de crâne à visées politiques (signez ici).

Homosexualité et génétique : des conclusions à l’eau tiède, semble-t-il. Alors, la génétique des comportements humains, c’est du pipeau ? En fait, il y a de vraies questions et des questions vraiment profondes, même si elles sont moins sexy. Car on doit se demander comment le développement humain et les comportements résultent de cette imbrication intime de la génétique avec la foultitude de causes de toute nature que le terme « environnement » résume de façon bien imparfaite : le milieu utérin, la nutrition, les interactions enfant-parents et les câlins reçus ou absents, l’éducation, la socialisation, les péripéties de toute nature qui jalonnent une biographie… Question massivement complexe mais non insoluble et sur laquelle un nouveau venu ouvre des perspectives décoiffantes : l’épigénétique. La découverte que le génome est affublé de post-it moléculaires qui marquent durablement certains gènes pour en limiter l’expression change la donne de façon assez spectaculaire. En effet, la mise en place de ces post-it - des marqueurs épigénétiques - semble répondre à des stimuli environnementaux, voire même à des comportements. Les travaux initiaux de Meaney et Szyf à Montréal avaient montré que le comportement maternant ou distrait des rattes induisaient chez leurs petits des attitudes caractéristiques durables touchan à la réaction au stress et que des modifications épigénétiques de l’ADN étaient en cause. L’idée que le matériel génétique n’est pas seulement porteur de l’hérédité classique, mais que par le biais des marqueurs épigénétiques, il forme un nouveau lien causal entre des facteurs environnementaux et des modifications à long terme au niveau neurologique, hormonal, et comportemental est un bouleversement conceptuel dont on ne voit pas vraiment toutes les implications à ce jour. Un nouveau domaine de recherches en plein essor. Et le jour où il se confirmera que certaines de ces modifications épigénétiques sont héritables à travers les générations d’individus, alors les anciens comme votre serviteur qui ont étudié la biologie dans les années 70 et 80 risquent l’infarctus, car cela voudrait dire qu’il y a transmission héréditaire de caractère acquis. Tout ça est encore largement incertain, mais qui sait… Les dogmes, plus ils sont imposants, plus ils font de bruit en tombant.

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Nos susceptibilités génétiques

C'est un joli petit feuilleton qui se joue aux Etats-Unis. Il concerne une compagnie dont je vous avais déjà parlé il y a quelques années. 23andme, un des premiers vendeurs de tests génétiques en ligne, s'est vu interdire le marketing par la Federal Drug Administration. La raison? Ils n'auraient pas suffisamment démontré que leurs tests fournissaient des résultats fiables.

Une des choses qui rendent cet événement intéressant, c'est que fournir une analyse génétique exacte est un exercice difficile. Même lorsqu'on ne regarde qu'une variante génétique, il y a toutes sortes d'incertitudes: la variante est-elle effectivement présente? Après tout un test parfait ça n'existe pas. La variante est-elle associée à quelque chose, comme une caractéristique ou une maladie? Ce n'est pas toujours le cas. Si c'est le cas, quelle est la probabilité que cette caractéristique ou cette maladie soit présente chez la personne qui porte la variante génétique? Après tout, nos gènes ne sont pas notre destin, un tas d'autres facteurs sont à l'œuvre, bref il y a souvent loin du gène à la vie quotidienne. Les vendeurs ne le précisent pas.  En envoyant leurs résultats sous la forme d'un niveau de risque pour une maladie, ils ont tendance à laisser en place des malentendus. Et ces vendeurs se sont maintenant fait reprendre là-dessus. Les régulateurs argumentent que c'est tout le champ de la vente directe des tests génétiques qui doit être mieux surveillé et correspondre à des standards plus clairs. Ils ont raison.

Les vendeurs de tests répondent, bien sûr. Ils précisent que les autorisations de la FDA sont faites pour être demandées un test après l'autre, et qu'une analyse de salive qui test des millions de 'composantes de l'ADN' n'est pas faite pour un dossier dans ce format. Et bien sûr ils ont raison aussi.

La suite? Elle est à suivre. Pour le moment, 23andme continue d'offrir les mêmes analyses, mais ne parle plus d'analyse médicale. A la place, la compagnie se concentre sur l'autre but qui amène des clients chez elle: mieux connaître d'où viennent ses ancêtres. Plus exact, plus fiable? Non. Ici aussi, une analyse génétique permet de savoir certaines choses, mais pas tout, et avec un degré d'incertitude. La recherche de ses ancêtres, en attendant, est nettement moins strictement régulée que la recherche de la santé. Ils testent donc les mêmes choses, puisqu'ils testent les mêmes gènes, mais ils ne donnent pas les mêmes informations en retour.

Et c'est là que se niche sans doute la partie la plus intéressante de cette histoire. Car vous avez bien lu: en réponse à une critique sur la fiabilité de leurs tests, 23andme ne vont pas les changer. Non, ils vont continuer de faire les mêmes analyses, mais comme la question qu'on leur aura posée sera différente, la réponse qu'ils donneront sera elle aussi différente. Jusqu'à présent, 23andme ont vendu à leurs clients la promesse d'informations sur leur santé. Mais certains les avaient déjà critiqués pour cela. Car finalement, la conclusion d'une telle analyse est souvent beaucoup de bon sens, et parfois de l'angoisse dont on ne sait que faire. Les conseils que l'on peut retirer d'une analyse génétique de ce type sont habituellement les mêmes que ceux que l'on connaissait déjà: il est meilleur pour la santé de manger sainement, d'avoir une activité physique régulière, et surtout de ne pas fumer. On peut effectivement, en plus, connaître ses risques spécifiques pour toute une série de maladies pour lesquelles aucune prévention n'existe, mais ensuite que faire de cette information? Lorsque le clic est facile et le prix abordable, on ne se pose pas assez souvent cette question. Et parfois, l'utilité principale de ces informations n'est pas pour le client. Mais alors qui? 23andme est très explicite sur la question: ils ont pour projet de faire avancer la science génétique en permettant des analyses de population, sur de grands nombres d'échantillons. Ils semblent aussi très honnêtes sur ce point: ils annoncent ne se servir pour cela que d'échantillons dont les propriétaires ont consenti à ce qu'ils soient ainsi employés.

Si l'on résume, donc, 23andme vendent de l'information qui vise surtout à satisfaire la curiosité, sans nécessairement apporter de réelle aide pour la santé. Cette information peut être inquiétante. Et son but le plus clair est de permettre de nouvelles découvertes. Pour cela, les clients sont prêts à payer.

On voit se dessiner ici les ingrédients d'un joli noeud. Car même si les tests employés étaient bien validés, comme l'exige la FDA, le marketing qui promet des avantages de santé serait-il tellement moins problématique? D'autre part, si les tests ne sont pas bien validés, on voit mal comment l'usage des résultats pour la recherche serait acceptable. Ce point semble complètement hors sujet pour la FDA (pour les curieux, la lettre est là). On ne voit pas très bien pourquoi, et le changement de marketing de 23andme ne règle rien du tout sur ce plan.

Un début de régulation dans un domaine qui a besoin de plus de cadre, donc. Mais un début seulement. Il n'aborde que l'enjeu le plus 'classique', dans un domaine qui est loin de l'être.

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Et si on démocratisait les OGM? (4)

Voilà, c'est le dernier chapitre de ma partie du débat paru dans Moins! sur les organismes génétiquement modifiés. Je vous ai mis la première partie il y a quelques temps, puis la deuxième, puis la troisième, voici maintenant la dernière.

A point nommé pour vous en parler, on a rediscuté la semaine passée du riz doré. A point nommé car il s'agissait de savoir si l'ONG Greenpeace, qui s'oppose tous azimut aux OGM, allait ou non nuancer sa position. Car d'une part la science a fait beaucoup de progrès en matière de modifications génétique et permet désormais une technologie nettement plus précise et mieux contrôlée. D'autre part, c'est de plus en plus clairement démontré que le riz doré, un riz biologiquement enrichi en beta carotène, le précurseur de la vitamine A, pourrait sauver des millions de personnes par années de la mort ou de la cécité. Faucher les champs où on le teste, vu comme ça cela paraît carrément indécent.

Cette discussion illustre très bien la question qui fermait le débat paru dans Moins!: car il s'agissait justement d'examiner les conditions dans lesquelles une position sur les OGM devrait, ou non, changer. La question posée était la suivante: Dans le domaine des plantes génétiquement modifiées, les positions sont généralement très tranchées entre les défenseurs et les détracteurs. Chaque camp cite les études qui lui conviennent, études qui semblent souvent totalement contradictoires. Comment expliquer cette polarisation radicale ainsi que l'instrumentalisation de la science, qui n'en sort pas grandie?

"Les êtres humains croient plus facilement ce qui conforte leurs convictions. La démarche scientifique existe justement pour dépasser cette tendance. C’est une démarche extraordinairement exigeante d’examen critique des observations. Si vous faites partie d’un "camp" et que rien ne peut vous faire changer d'avis, alors ce que vous faites n’est pas de la science. Les opposants écologistes aux OGM sont ici dans une situation inconfortable, et certains s’en rendent d’ailleurs compte: la même démarche scientifique conclut que la modification génétique des plantes peut être sûre, et aussi que le réchauffement climatique d'origine humaine est réel. Alors ensuite, soit cette démarche est fiable, soit elle ne l’est pas! En s’opposant aux climato-sceptiques, certains ont dû réexaminer des arguments qu’ils avaient eux-mêmes utilisés en s’opposant radicalement aux OGM: en comprenant mieux comment la science se fait, y compris dans ce domaine, ils ont changé d’avis sur le génie génétique. Là, la science en sort grandie, et eux aussi."

La démarche scientifique, si on l'enseigne suffisamment pour que tous puissent comprendre comment elle marche, c'est un magnifique outil de démocratisation des connaissances. Vous ne savez pas si une observation est crédible ou pas? On vous explique comment on l'a faite, chacun peut la lire et la commenter, et vous pouvez ainsi comprendre par vous-même. Bien sûr, c'est difficile. Exigeant, plutôt. Ca mérite un effort de part et d'autre. Pour expliquer plus clairement, et aussi pour mieux comprendre. Il faut apprendre à faire le tri entre l'information réelle et toute une série de dénismes. Malgré tout cela la démarche scientifique laisse à chacun le choix: si je veux apprendre comment ça marche le génie génétique, comment on sait si les OGM sont sûrs, je peux le faire.

Je vous en parlais au sujet du PNR 59. Le Fonds National Suisse a récemment mis en ligne une trentaine d'études financées par des deniers publics en dans notre pays sur cinq ans ainsi qu'une revue internationale de la littérature disponible. Les résultats ont été résumés pour que tout un chacun puisse y avoir accès, et sont bien sûr également disponibles en français. Vous trouverez tout ça ici. 

Alors maintenant, des organisations comme Greenpeace sont prises dans la contradiction. La science: fiable ou pas fiable? La lutte: contre le réchauffement climatique ou contre les OGM? Dans des paysages comme celui qui ouvre ce billet, va-t-on planter des récoltes résistantes à la sécheresse ou 'planter' du désert? Pour qui souhaite un minimum de cohérence, il va falloir choisir...

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Et si on démocratisait les OGM? (3)

J'ai écrit récemment une des parties d'un débat sur les organismes génétiquement modifiés. Il est paru dans Moins! un journal que vous ne connaissez peut-être pas et dont voici le site pour les personnes intéressées. Petit coup de pub: allez le lire, en version papier donc car c'est la seule qui existe, au moins pour le débat en question...

Mais pour ceux qui n'y auraient pas accès, je vais vous donner ma partie, avec quelques commentaires, en chapitres successifs. Surtout que dans le débat 'pour et contre' il y a toujours une part de trop simple. Car au fond, si la question n'était pas si mais comment?

Je vous ai mis la première partie il y a quelques temps, puis la deuxième, voici donc la troisième partie:

Cette fois, la question est la suivante: L'année passée a été publié le PNR59, programme de recherche scientifique commandé par la Confédération pour prendre une décision « éclairée » quant à la fin du moratoire sur les OGM, approuvé par le peuple en 2005. Alors que les résultats de cette étude semblent plutôt positifs pour les OGM, le parlement a prolongé le moratoire jusqu'en 2017, date à laquelle un assouplissement est prévu. Comment jugez-vous la gestion du dossier OGM par le parlement et le gouvernement suisse?

"En annonçant la fin du moratoire, le parlement a tiré les conséquences des résultats du PNR59. C’est une application cohérente et responsable du principe de précaution. Vous commencez avec un doute légitime sur des conséquences environnementales ou sanitaires d’une technologie. Vous freinez son application pour pouvoir récolter les informations nécessaires. Quand elles sont disponibles, si le risque s’avère absent ou gérable, vous mettez en place la réglementation nécessaire et vous levez le moratoire. Cela ne signifie pas que vous autorisez tout. Si au lieu d’un moratoire sur « les OGM », on avait levé un moratoire sur « les médicaments », certains auraient toujours été interdits à la vente ou vendus uniquement sur ordonnance, sur la base de leur profil spécifique."

Ce PNR59, c'est une trentaine d'études financées par des deniers publics en Suisse sur cinq ans ainsi qu'une revue internationale de la littérature disponible. Les résultats ont été résumés pour que tout un chacun puisse y avoir accès, et sont bien sûr également disponibles en français. Vous trouverez tout ça ici.

Si on démocratisait les OGM? Il y aurait sans doute plus d'études financées ainsi par la main publique plutôt que par des entreprises ou des militants. Un des effets paradoxaux des débats, des fauchages, des obstacles aux OGM en général, a été de laisser largement le champ libre aux recherches financées par des fonds privés.

Cela a aussi encouragé la logique du "tout ou rien", alors que la bonne réponse n'est vraisemblablement ni l'un ni l'autre. S'agissant des médicaments, nous le savons. Lorsqu'on l'applique aux OGM, cette réponse est cependant inconfortable: nous n'avons actuellement pas tellement tendance à appliquer aux aliments les précautions qui entourent les médicaments.

D'une part c'est normal: nous voyons davantage les risques de substances très actives, comme les médicaments. D'autre part ce n'est pas vraiment logique. Certains aliments sont toxiques: pensez à certains champignons, au seigle dans lequel vient se mêler l'ergot. En plus, certains aliments sont inoffensifs en prise unique mais sont dangereux sur le long terme. Pensez...au sucre. Oui oui, aussi celui qui est dans les yaourts censés vous aider à digérer ou à combattre les infections hivernales. Effets bénéfiques qui sont par ailleurs rarement et chichement démontrés.

Plutôt que de réguler strictement les OGM, c'est sans doute toute la filière alimentaire qu'il faudrait soumettre à des réglementations plus strictes. Et les critiques "des OGM" ont raison sur un point: les critères appliqués devraient tenir compte non seulement de l'hygiène (ce qui est déjà le cas) et de la santé humaine plus généralement, mais aussi des effets environnementaux de la production et de la consommation. En revanche, appliquer cela au yaourt est aussi important que de l'appliquer au maïs. Une fois de plus, donc, rien de si spécifique aux OGM dans cette réponse...

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Et si on démocratisait les OGM? (2)


J'ai écrit récemment une des parties d'un débat sur les organismes génétiquement modifiés. Il est paru dans Moins! un journal que vous ne connaissez peut-être pas et dont voici le site pour les personnes intéressées. Petit coup de pub: allez le lire, en version papier donc car c'est la seule qui existe, au moins pour le débat en question...

Mais pour ceux qui n'y auraient pas accès, je vais vous donner ma partie, avec quelques commentaires, en chapitres successifs. Surtout que dans le débat 'pour et contre' il y a toujours une part de trop simple. Car au fond, si la question n'était pas si mais comment?

Je vous ai mis la première partie il y a quelques temps, voici donc la deuxième partie:

Cette fois, la question est la suivante. Que vous inspire l'utilisation du génie génétique dans l'agriculture, dans le monde en général et en Suisse en particulier ?

"L’utilisation du génie génétique n’est qu’un moyen: les avantages et les inconvénients qui y seront liés dépendront forcément des buts poursuivis. Quels sont les avantages et les inconvénients de la métallurgie, ou de l’électricité? L’électricité peut servir aux transports publics comme à l'exécution des condamnés à mort, et entre ces deux buts tout change. Il est évident que légiférer sur ces deux buts séparément est une démarche plus intelligente que d’interdire l’électricité elle-même. Interdire l’électricité rendrait les transports publics moins efficaces, aurait des retombées écologiques négatives... et cela ne rendrait pas la peine de mort impossible. 

Le génie génétique peut servir à accentuer des inégalités de pouvoir et de revenu, mais aussi à mettre dans les mains des paysans des plantes qui augmenteront leur sécurité ou leur santé. Là aussi entre ces deux buts tout change. Là aussi, interdire limiterait beaucoup les dimensions positives et n’empêcherait pas les négatives. Une discussion véritablement responsable ne devrait donc pas se demander si « le génie génétique » a plus d’avantages ou d’inconvénients, mais quels devraient en être les buts admis, dans quelles conditions ce moyen est sûr, ou encore, comment faire pour que ses bénéfices et ses risques soient équitablement répartis." 

J'ai été très contente de voir un très bel exemple détaillé récemment dans un excellent message blog que vous trouverez intégralement ici. Voici l'extrait, il s'agit du Golden rice dont l'image ouvre ce billet:

"(...) une étude de 2009 a confirmé que le Golden Rice apporte bien des vitamines A aux humains qui en consomment. Ahhh ! Frankenstein ! Euh, c’est une enzyme qui existe déjà dans le riz, mais s’exprime dans les feuilles pas dans les graines. On prend la version d’une plante qui l’exprime dans des graines que l’on mange déjà (le maïs, vous suivez ?), et on le fait exprimer dans les graines de riz. Il n’y a pas de pesticides, rien de potentiellement plus dangereux que de prendre un complément de vitamine A avec son bol de riz. 

Par ailleurs, les brevets sont gérés par une ONG, et les paysans n’ont aucun frais à payer (le riz est au même prix que du riz standard) jusqu’à une production de $10’000, ce qui couvre apparemment les 99% des paysans des zones pauvres visées. Après il faut payer pour l’exploitation commerciale. Mais dans tous les cas les paysans ont le droit de replanter." 

Alors, le Golden rice, plutôt transports publiques ou plutôt exécution capitale? Vu comme ça, cela semblerait pourtant assez clair...Si on démocratisait les OGM? Il y aurait sans doute plus d'utilisations de ce type, et moins d'utilisations exploitatives. Il y aurait peut-être aussi plus de ce genre de brevet-là. Car c'est un bel exemple, non? Un brevet qui sert à maintenir le prix abordable, plutôt qu'à l'enfler...

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