Capacité de discernement

La capacité de discernement, c'est un concept crucial quand il s'agit de prendre des décisions cliniques de manière respectueuse à la fois de la volonté d'un patient et de son intérêt. En bref, c'est la capacité à décider soi-même, avec lucidité et en connaissance de cause, de ce que l'on veut et de ce que l'on ne veut pas. Si on l'a, et que l'on a compris les enjeux d'un choix qui se présente là maintenant, alors nous avons tous le droit de décider si nous voulons consentir -ou non- à une prise en charge médicale. Notre corps nous appartient: nous avons le droit de refuser toute ingérence, si bien intentionnée soit-elle. Si on n'a pas la capacité de discernement face à un choix donné, en revanche, ça veut dire que les choix que l'on exprime ne sont peut-être pas véritablement les nôtres. Et que l'on a besoin d'être protégé. Les décisions seront alors prises autrement qu'en suivant ce que demande la personne concernée. On ne vous laisserait pas (j'espère) signer une hypothèque en état d'ébriété, ni rédiger un testament alors que vous seriez devenu incapable de reconnaître vos proches ou de vous rappeler qui ils sont. On ne vous laisserait pas non plus refuser une intervention chirurgicale si vous êtes incapable d'en concevoir les enjeux. Par exemple parce que vous êtes un enfant trop jeune. Ou parce que vous venez de subir une commotion cérébrale et que votre mémoire est affectée. Dans la pratique clinique, le même genre de garde-fous doit parfois être appliqué. Il est donc important de savoir évaluer la capacité de discernement, et comme toute aptitude clinique, elle s'apprend.


Cela,  c'est la version courte. J'ai donné la semaine passée pour des collègues un atelier sur la question que je leur ai promis de mettre en ligne. Elle est ici. Comme évaluer la capacité de discernement est important, mais parfois difficile, je leur ai aussi promis de mettre en ligne les outils décrits dans la présentation. Ils sont ici. Alors oui, c'est la version courte. Mais si vous avez des questions laissez-les dans les commentaires et alors promis: j'y reviendrai...

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Vos favoris de 2011

C'est de nouveau le moment de vous faire un best of. Comme l'an dernier, je me base sur la fréquence de vos visites pour vous en faire la liste.


Voici donc, dans l'ordre inverse comme il se doit, les 10 pages les plus lues de 2011:

10- Cellules souches: brevettera? Brevettera pas?

9- Contrôler les coûts de la santé: oui mais comment?

8- Drogue: d'abords ne pas nuire

7- Un exercice d'empathie

6- Science émancipatrice

5- Le miracle de la machine à laver

4- Un doctorat ça suffit pas

3- Assistance au suicide: les cas les plus difficiles

2- Un enfant pour en sauver un autre
 
Et comme chaque année vous êtes chou: l'article le plus lu est le genre de chose que l'on cherche par altruisme...En 2011 ce fut:

1- Parler du cancer

Celles-là, c'est les pages les plus lues écrites en 2011. Mais parmi celles qui ont été écrites avant, six restent dans le top ten des visites. Fugace, la blogosphère? En tout cas les voilà, certaines pour la 2e ou même 3e année consécutive:

6-Soigner le choléra
5-Euthanasie?
4-Don d'organes: comparons les campagnes
3-Don d'organes: la Suisse mauvaise élève
2-Diagnostic préimplantatoire
1-Merci

...Merci, donc à vous! Bonne (re)lecture, et bonne année 2012 à tous.

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Encore un médecin assassiné (2)

Il est des régions du monde où il est dangereux d'exercer la médecine. On se rappelle par exemple de nos confrères assassinés aux Etats-Unis pour avoir pratiqué des avortements dans des conditions sûres. Mais cette fois c'est en Syrie que l'on vise les soignants. Leur crime? Avoir soigné des malades. Rien que ça. Comme disait un collègue, excusez-nous d'avoir dérangé...

Que ces malades soient des blessés, et qu'ils l'aient été par la répression du régime, rend bien sûr la chose encore plus grave. Car il s'agit ici d'augmenter sciemment le nombre de victimes en intimidant, ou en éliminant carrément, ceux qui seraient susceptible de leur sauver la vie. Il s'agit aussi du symptôme d'une situation où le principe de neutralité n'importe visiblement pas (ou plus) du tout aux dirigeants. Le fondement selon lequel la médecine soigne tout le monde, sans distinctions. Et ici, surtout sans faire de distinctions entre les malades qui partageraient ou ne partageraient pas les 'bonnes' idées politiques. Le signe d'une société si scindée que 'les médecins des autres' pourraient y être ciblés sans crainte? Car après tout et qu'on le veuille ou non, ce principe de neutralité est une garantie autant pour les dictateurs et leurs appuis que pour leurs opposants...

Le signe, en tout cas, de ce que la médecine peut avoir d'admirable dans des conditions effroyablement difficiles. Il y a des collègues dont on doit être vraiment très fiers.

Mais aussi, bien sûr, un signe parmi bien d'autres du peu de poids de la vie des citoyens de Syrie aux yeux de leurs dirigeants. Car les soignants, il n'y en a pas pléthore. En tuer un, surtout dans une région du monde d'où les médecins émigrent, c'est tuer avec lui des centaines d'autres vies.

Bon, ok, ce dernier commentaire ne vaut que lorsqu'il s'agit d'un médecin qui exerce son métier. Car pour ajouter encore une touche à ce tableau déjà bien sombre, et pour respecter, là, un autre principe de neutralité, je me dois de vous rappeler que Bachar El-Hassad fut, il y a bien longtemps et dans une vie antérieure, ophtalmologue. C'est vrai, il y a aussi des collègues dont on n'est vraiment mais alors vraiment pas fiers du tout.

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Václav Havel, très brièvement



Certains grands esprits sont grands par leur capacité à résumer l'essentiel alors que la plupart d'entre nous se focalisent sur le détail qui leur est proche. Parmi un nombre impressionnant de personnes qui nous ont quittés ces derniers jours, celui qui restera le plus longtemps dans les mémoires -avec et malgré ses controverses- sera sans doute Václav Havel. Vous ne savez pas qui c'est? Je suis prête à parier que vous avez moins de 20 ans, et le lien qui est dans son nom est alors un cadeau pour vous.

Dans la vidéo qui ouvre ce message, et dans laquelle il ouvrait la conférence du World Institute for Development Economics Research of the United Nations University (WIDER) il résume en un peu plus de 7 minutes une vingtaine d'années, et des enjeux dont nous peinons encore trop souvent à intégrer les grandes lignes. Il va beaucoup nous manquer. Quoique...peut-être malgré tout moins qu'il ne devrait. Car le monde qu'il a contribué à façonner est un lieu où des combats comme le sien sont plus difficiles à comprendre. Aller en prison pour s'être exprimé? A l'heure d'internet cela semble absurde et pourtant... Un président auteur de pièces de théâtre, plutôt qu'économiste? Les mauvaises langues diront 'auteur explicite de pièces de théâtre, plutôt qu'économiste', mais la réalité est qu'on chercherait avec difficulté le pays qui l'élirait aujourd'hui. Lui le disait d'ailleurs déjà: "L'élément tragique pour l'homme moderne, ce n'est pas qu'il ignore le sens de sa vie, c'est que cela le dérange de moins en moins."

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Directives anticipées et participation du patient

Depuis quelques années, je soutiens une équipe qui fait un très joli travail pour aider des patients atteints d'insuffisance rénale et dialysés à rédiger, s'ils le souhaitent bien sûr, des directives anticipées. Eh bien, l'équipe a reçu lors de la journée qualité des Hôpitaux Universitaires de Genève la distinction 2011 'Participation du patient à sa prise en charge'. C'est un travail de longue haleine, qui se poursuit et se réalise avec soin et respect, qui est récompensé là. Bravo à toutes et tous.

Et la démarche présentée? Nous l'avons publiée il y a quelques temps dans la Revue Médicale Suisse. Je laisse donc les personnes intéressées découvrir l'original. Si vous avez des questions ou des commentaires, n'hésitez pas.

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Des centaines d'histoires personnelles


J'essaie de m'en tenir à l'actualité de la bioéthique dans ce blog, mais là on a comparé les éthiciens aux indignés alors je ne résiste pas:

Si vous ne connaissez pas encore le site "We are the 99%", allez vite le voir et dites-moi ce que vous en pensez. Des pages et des pages d'histoires individuelles, de personnes ordinaires qui racontent sur une feuille de papier pourquoi elles se sentent exclues par nos structures sociales. Je vous en ai mise une en illustration de ce billet.  Il y a évidemment d'autres sites en rapport (attention le dernier à une bande son), y compris à Genève, ainsi que des commentaires, des données, et des personnes qui rappellent à juste titre que les inégalités dans les pays industrialisés ne sont que le début de l'histoire...mais vous connaissez tout ça n'est-ce pas.

Allez voir le site, donc. C'est à la fois poignant, impressionnant, désarmant. Le plus frappant à part l'alignement de centaines d'histoires, est la constance des demandes: libérez-nous des dettes et donnez-nous des conditions permettant de mener une vie décente. Le substrat des révoltes depuis le début de l'histoire.

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Mes collègues...


OK, cette fois ce n'est pas un collègue direct. Mais Bertrand Kiefer, qui est un confrère et un collègue au sens large, commente cette semaine dans la Revue Médicale Suisse le dernier numéro de Bioethica Forum, notre revue de bioéthique. Il dit beaucoup de bien de nous, ainsi qu'un certain nombre de choses vraiment intelligentes. Je vous envoie donc le début du texte, avec le lien comme il se doit:

"Il y a près d’une année, le Tribunal fédéral (TF) déstabilisait sans ménagement la mécanique classique du remboursement des prestations. Il donnait en effet raison à une caisse maladie qui refusait de prendre en charge le traitement par Myozyme d’une femme atteinte de la maladie de Pompe (une forme rare de myopathie). L’efficacité d’un médicament ne suffit pas, avait argumenté le TF. Pour qu’il soit remboursé, en particulier s’il ne se trouve pas sur la liste des spécialités, il faut qu’il existe un rapport «raisonnable» entre son coût et son efficacité. Dans son arrêté, le TF estime trop élevé celui du Myozyme utilisé chez cette patiente. (...)"

L'image vous intrigue? Lisez, vous verrez à quoi elle se réfère...Et puis au passage, si ça vous donnait envie de vous abonner  à notre revue, ou à la sienne, je trouverais ça entièrement justifié bien sûr.

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