Solidarité

C'est à nouveau un de mes billets dans la Revue Médicale Suisse que je partage avec vous ici:

Ses chaussures étaient inadéquates et c’est au sommet du col qu’elle s’est foulé la cheville. Assez pour avoir besoin d’être soutenue dans la descente ; pas assez pour appeler un hélicoptère. Nous étions trois avec elle : un bandage de fortune, puis deux pour la soutenir et un pour porter son sac. La descente était longue, la pluie tomba, la nuit arrivait.

Nous avions alerté nos compagnons de route au village. Autour d’eux, l’aide s’organisait.

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Mort cérébrale


Comment sait-on qu'une personne décédée est véritablement décédée? Dans le cadre du don d'organe, mais pas seulement, cette question est particulièrement importante. Si je devais un jour être concernée, sera-t-on vraiment certain? Et puis, risque-t-on de me déclarer morte pour pouvoir prélever mes organes, risquerait-on de mettre l'intérêt de la personne en liste de greffe avant le mien? Ces questions sont dérangeantes. Du coup, même si de nombreuses personnes se les posent, les réponses sont rares. Mais nous l'avons fait: hier soir, un débat abordait tout cela aux Hôpitaux Universitaires de Genève. Ça a été diffusé sur Facebook, mais comme pas tout le monde a envie d'être sur Facebook je vous ai mis la vidéo dans ce billet. Ça ne commence pas tout de suite mais vous savez comment avancer, je vous fais confiance.

Il y a aussi eu un article de presse, qui est ici.

Billet d'invitée: Les soins infirmiers, c'est pour nous tous

Vous avez peut-être vu tourner ces temps l'initiative "Pour des soins infirmiers fort". L'enjeu est important. Pour vous en parler, nous avons aujourd'hui un billet d'invité de Marianne Wälti-Bolliger. Elle est membre du comité de la Société Suisse d'Ethique Biomédicale, et aussi de la commission d'éthique de l'Association Suisse des Infirmières. Vous pouvez signer l'initiative ici, et naturellement nous dire ce que vous en pensez dans les commentaires. Voici:


Stop à la fragilisation du système de santé par un engagement massif de tous pour des soins permettant l’accès à la santé pour tous !

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Quand nous parlons de justice


Je vous met comme d'habitude mon dernier billet dans le Bulletin des Médecins Suisses, avec le lien vers l'original.

Cette fois, j'ai vraiment senti le manque de place dans le format. L'idée est de continuer la petite série des pauses cafés de l'éthique, où j'avais déjà parlé de directives anticipées, et d'autonomie. Cette fois-ci, c'est la justice distributive. Un gros morceau, pas entièrement adapté au format d'une pause café. J'ai néanmoins tenté l'exercice. N'hésitez pas à commenter!

Et puis l'image: allez jeter un oeil en ligne, vous verrez qu'elle a toute une série de variantes dont certaines sont bien trouvées.

Voici le texte:

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CRISPR/Cas9

Plusieurs d'entre vous m'ont demandé ce billet. Il a un peu tardé, mais le sujet méritait un commentaire un peu plus long que d'habitude. Le voilà: n'hésitez pas à compléter dans les commentaires.

Pendant une vingtaine d'années, un consensus solide a entouré la manipulation génétique de la lignée germinale humaine: niet, rien à faire, l'interdiction est planétaire. Ceci, a-t-on dit en substance, est une une borne à ne jamais franchir.

Pourquoi ? Sur les raisons, le consensus est nettement moins important. Comme souvent lorsqu'il y a un accord très large sur une question, cet accord est en fait le résultat d'une convergence d'arguments différents. On est d'accord sur quoi faire, sans être pour autant d'accord pourquoi c'est cela qu'il faut faire.

C'est une des raisons pour lesquelles l'annonce d'un progrès net dans l'utilisation de la technologie d'édition génétique CRISPR-cas9 sur des embryons humains est si fascinante. En règlant un problème, ou du moins en offrant un progrès substantiel sur ce problème, elle donne l'impression de régler les problèmes. En fait, elle érode une des raisons du consensus. La question de la modification génétique de la lignée germinale s'en trouve à nouveau ouverte.

Quels sont les arguments en présence? Principalement, il y en a cinq. 

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La valeur et le prix

C'est l'été et voici mon billet dans le Bulletin des médecins suisses. Entre-temps, il a été annoncé qu'un autre médicament contre l'Hépatite C avait été négocié à un prix plus bas et qu'il serait désormais remboursé pour tous les patients candidats en Suisse. C'est bien! Mais les enjeux demeurent quand même. Alors comme d'habitude le texte, avec le lien ici:

Pour ne pas payer plus cher, que sommes-nous prêts à sacrifier? Cette question a malheureusement pris une actualité effrayante avec l’incendie de la tour Grenfell à Londres le 14 juin dernier. L’incendie, qui a fait près de 80 morts, aurait été accéléré en partie par un revêtement connu pour être inflammable. Il était légèrement moins cher que le revêtement concurrent. Très légèrement: l’économie totale, pour le bâtiment entier, aurait été d’environ 5000 £. On comprend la rage des survivants.

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Don d'organes: reparlons du consentement proposé

J'ai donné une conférence récemment sur le consentement au don d'organes. En Suisse, comme dans un certain nombre d'autres pays, on songe régulièrement à passer du système actuel du consentement explicite au système du consentement présumé. C'est une question dont je vous avais déjà parlé ici. Je vous avais déjà dit que je trouvais qu'une troisième option était ici là bonne: le consentement proposé. 

Voilà comment on pose habituellement la question:

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Merci Simone

La mort des grands personnages est l'occasion de se rappeler de leur vie. Les hommages à Simone Veil se sont cette semaine succédés, en France et dans le monde. L'annonce d'un décès comme celui-ci fait comme une pause, le temps de nous remettre en mémoire qui ils ont été et ce que nous leur devons. Dès maintenant, après tout, c'est là qu'ils existeront.

Lorsque la personne décédée a atteint, comme ici, un âge respectable, c'est aussi le moment de mesurer le chemin parcouru. Je vous propose donc ici quelques images d'archives. Voici d'abord des extraits du débat de 1974 sur l'interruption de grossesse. Vous verrez, son discours n'y est pas entier: vous trouverez le texte ici. Il y a surtout un reportage plus récent mais qui donne bien le ton de l'époque. Dans ce ton, certaines choses ont beaucoup changé, certaines autres pas tant que cela. Dites-nous (poliment s'il vous plait) ce que vous pensez dans les commentaires.

Au-delà du ton, cependant, ce qui a changé est immense. Je ne veux pas parler seulement du respect des femmes qu'exprime la légalisation de l'avortement. Je veux parler des vies que cette légalisation a sauvées. Combien sont-elles? En fait, on ne sait pas les compter. Comptait-on, avant la loi Veil, le nombre de victimes des interruptions de grossesse illégales? L'Afrique du Sud a, en légalisant l'interruption de grossesse, diminué de 90% la mortalité liée à la grossesse. Pour la France, je n'ai pas trouvé de chiffres: sans doute, à l'époque, ne les récoltait-on pas de la même façon même après 1975. L'interruption de grossesse illégale menace la vie des femmes qui y ont recours, l'interruption de grossesse légale la remplace et sauve ces vies. L'interruption de grossesse illégale menace aussi la fertilité future des femmes. Une partie des enfants nés après des interruptions de grossesse légale doivent donc également leur vie au médecin qui aura pratiqué le geste de manière correcte, et au législateur qui l'y a autorisé. Qu'en savez-vous? Vous êtes peut-être du nombre. raconte Twitter depuis ces quelques jours. On oublie trop souvent à quel point.

Found in translation

Il m'arrive d'écrire dans la revue des hôpitaux suisses. Certains d'entres vous la lisent peut-être, mais certainemet pas tous. Mon dernier billet portait sur un sujet un brin invisible, et qui mériterait qu'on s'y attarde plus. D'ailleurs ça commence: la Commission Nationale d'Ethique vient de s'y pencher. Je vous le reproduis ici, le lien vers la revue est ici. Voici:

"La Commission nationale d’éthique a publié récemment un avis qui mérite que l’on s’y arrête. A première vue, on parle de patients étrangers, car il s’agit d’interprétariat communautaire. De cette forme de traduction qui sait « traduire », au delà des mots, ce que l’on entend dans différentes cultures par les mots que l’on dit.

Cette question est en elle-même importante. Dans notre pays, 9% de la population a une langue principale différente des langues nationales et un peu moins d’un tiers de cette population n’en parle aucune. Lorsque l’on tombe malade, cela pose des problèmes évidents.

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En consultation, la question de l'argent

C'est le moment de mon billet dans la Revue Médicale Suisse. Comme d'habitude, le lien est ici et le texte est là:

« Je ne peux pas aller consulter vous savez, mon assurance je l’ai prise juste pour être en règle : elle ne paie pas le docteur… » Elle était vraiment très gentille, cette dame, et très sincère. Elle toussait vilainement et je m’étais souciée d’elle. Même pas en consultation en fait, juste souciée d’elle. Alors bon, quand elle m’a fait cette sortie sur son assurance, je dois avouer que ma première réaction était d’avoir envie de lui expliquer qu’en fait son assurance paierait, après la franchise et les quotes-parts, que c’était normal, que la LAMal était comme ça pour tout le monde : on n’est pas prof impunément. Heureusement, je me suis retenue. Elle avait raison, au fond. Son assurance paierait, mais elle avait l’air d’avoir comme on dit des moyens modestes. Sa quote-part allait peser lourd, sa franchise serait élevée, le remboursement n’interviendrait pas à temps pour empêcher le bâton dans les rouages de sa fin de mois. De son point de vue, son assurance ne payait en fait vraiment pas le médecin.

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Objection de conscience

C'est une question délicate, l'objection de conscience. "Un médecin qui invoque sa clause de conscience face à une demande d'un patient, est-ce toujours légitime?" Je ne suis pas surprise que ce soit une de vos questions. Pour y répondre, on doit procéder par étapes.

Pour commencer, il faut comprendre que le terme "objection de conscience" est souvent utilisé de manière trop large. On s'en sert comme si cela désignait toutes les situations où l'on refuse quelque chose pour des raisons morales. Mais nous prenons dans notre vie beaucoup de décisions, il est fréquent que des raisons morales y soient pour quelque chose, et nous refusons beaucoup de choses. Si j'ai promis d'aller chercher ma fille à la gare, qu'une amie m'invite à boire un verre, et que je lui dis non pour tenir ma promesse et remplir mon devoir de parent, je viens de refuser quelque chose pour des raisons (entre autres) morales. Ca ne suffit pas pour en faire une objection de conscience.

En plus du refus et de la conscience, il y a dans l'objection de conscience l'idée que je me refuse à quelque chose qu'en fait j'aurais dû faire. Ou que je me refuse à quelque chose qui est en fait requis par une autorité. Il y a l'idée de se soustraire à une obligation habituellement reconnue, pour des raisons de conscience personnelle. Ce n'est pas pour rien que l'exemple par excellence est l'objection au port d'armes et au service militaire. Pour faire une objection de conscience il faut une obligation, un refus de s'y soumettre, et une raison de conscience personnelle à ce refus.

Revenons donc à la médecine.

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Une tragédie grecque

Comme vous vous le rappelez peut-être, donc, la filiale locale de Novartis a été mise en examen il y a quelques mois par la justice grecque pour corruption et plusieurs cadres ont été entendus. Cette histoire est intéressante et mérite un deuxième coup d'oeil, car elle illustre un côté de notre vie morale dont nous n'avons pas toujours conscience: la responsabilité pour les circonstances.

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Responsabilité pour les circonstances

J'ai refait un billet dans le Bulletin des médecins suisses. Cette fois, le sujet est un peu éloigné de l'éthique directement médicale, quoique. Comme vous vous le rappelez peut-être, la filiale locale de Novartis a été mise en examen il y a quelques mois par la justice grecque pour corruption et plusieurs cadres ont été entendus. Cette histoire est intéressante et mérite un deuxième coup d'oeil, car elle illustre un côté de notre vie morale dont nous n'avons pas toujours conscience.

Lorsque quelqu'un se comporte mal, fait quelque chose qu'on a de bonnes raisons d'interdire, on a le droit de blâmer cette personne et parfois de la punir. Il arrive cependant que cette personne ne soit pas seule coupable. Régulièrement, et dans toutes sortes de situations, nous devrions mieux tenir compte de ce que l'on pourrait appeler la responsabilité pour les circonstances. En agissant sur l'environnement dans lequel travaillent les personnes, on peut avoir une influence sur leurs comportements. Banal. Sauf qu'il arrive que nos actions augmentent la probabilité d'actes illicites.

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Vos questions d'éthique à vous

Nous allons faire un test, et si ça marche ce sera une nouvelle forme de billet dans ce blog. Les commentaires, sur la plateforme de blogger c'est un peu moyen. Plusieurs d'entre vous m'ont contactée pour me dire que ce n'était ni facile ni fiable, bref que vous ne parveniez pas à mettre des commentaires. Alors je teste un système interactif qui devrait permettre de faire plus facilement.

Ma première question sera simple: quels sujets aimeriez-vous voir traiter ici?

Dans le tableau ci-dessous, si tout va bien, vous devriez pouvoir écrire des propositions, commenter celles des autres, et voter sur les propositions. Les intitulés sont en anglais parce que, vaille que vaille, je n'ai pas trouvé de plateforme francophone qui fasse la même chose. Dites-moi si vous en connaissez une, je serais très reconnaissante!

Pour commencer, on va essayer sur le système anglophone. Cela devrait être simple:

1) Vous inscrivez votre nom sous "enter your name" et vous cliquez "Join".
2) Vous cliquez sur "Add an idea" en haut à droite, et voilà: vous pouvez évidemment écrire votre proposition en français.

Vous pouvez voter sur les propositions des autres en cliquant sur le rond blanc qui se trouve sur chaque billet. Vous pouvez commenter en cliquant sur l’icône de commentaire qui se trouve également sur chaque billet.

Une ligne ou un mot-clé suffira, comme je vous le dis on teste. Et n'oubliez pas de voter sur les propositions des autres!

Alors allons-y, on va voir si ça marche...

Mes collègues: la vache parfaite, c'est quoi?





C'est un sujet cher aux Helvètes, pour toutes sortes de raisons. L'émission Vacarme a fait récemment une série sur l'usage de la génomique et du génie génétique pour améliorer les vaches. Améliorer, avez-vous dit? C'est quoi, ça, d'abord? Une vache qui donne plus de lait? Du meilleur lait? Qui survit mieux? Qui relâche moins de gaz à effet de serre? Qui est plus - allons, lâchons le mot - heureuse? Et si les vaches doivent être plus heureuses, c'est quoi exactement? Ma collègue, la philosophe Christine Clavien, a participé à l'émission. Ça vaut le détour.

Il y a quelques années, j'avais accompagné dans les Alpes un petit groupe de collègues venus en Suisse pour une semaine d'atelier. En traversant les alpages du Simmental, l'un d'entre eux était devenu de plus en plus silencieux, puis de plus en plus troublé: "J'ai rencontré des vaches heureuses!" s'était-il exclamé "j'ai toujours pensé que c'était une invention!" Avait-il raison?

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La médecine au service du reste de la vie

Cette fois, j'ai fait mon billet dans la Revue Médicale Suisse sur une des situations fréquemment référées en consultation d'éthique. Depuis quelques temps, je fais partie des deux équipes de consultation à Genève et Lausanne et la comparaison ne fait que confirmer que voilà des cas où les difficultés sont récurrentes. Comme d'habitude, je vous met le lien ici. Dites-nous ce que vous pensez.

"Les cas référés à une consultation d’éthique sont tous différents, bien sûr. Néanmoins, il existe aussi des schémas récurrents et, au fil des consultations, certains messages reviennent. Les plus fréquents sont, en apparence du moins, les plus simples. Le plus important est sans doute celui-ci : La médecine sert à rendre possible le reste de la vie. Cette idée, le philosophe américain Norman Daniels s'en est servi dans les années 1980 pour justifier l'accès universel aux soins de santé. Si nous devons garantir l’accès de tous à des soins équitables, disait-il, c’est parce qu’une société juste doit permettre à tous l’accès à un éventail suffisant de futurs possibles. La maladie, ça ferme des portes. La médecine, ça doit les rouvrir.

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Couverture des soins dentaires

Pourquoi devons-nous tous avoir un accès équitable aux soins de santé? Les réponses varient. Peut-être que c'est simplement un droit, d'avoir accès aux moyens de la médecine quand on est malade et qu'on en a besoin. Peut-être sommes-nous simplement des gens bien, ou alors nous reconnaissons les déclarations de l'OMS, et les textes de droit international qui semblent bel et bien garantir une forme de droit à la santé. Peut-être, si nous voulons être plus précis, qu'en fait le droit d'accès aux soins de santé est ancré dans une idée politique plus large. Nous reconnaissons dans nos sociétés l'importance de l'égalité d'opportunité. Chacun doit avoir accès à un éventail suffisant de futurs ouverts. Les métiers, les positions sociales, doivent être ouvertes au mérite. Chacun doit pouvoir faire des choix, s'investir, et avoir sa chance.

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Consentement présumé

Parfois on n'a pas le temps de bloguer tout de suite mais les sujets ne disparaissent pas pour autant. En fin d'année dernière, la France a modifié ses règles sur le consentement au don d'organes. Ca a été l'occasion de voir qu'il y a pas mal de malentendus autour de cette question. C'est dommage. Le sujet est important, et en Suisse on aurait besoin de mieux le comprendre. Quelques points, donc, pour faire le point.

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