La justice sur contrat



On a beaucoup parlé d'enjeux et de situations suisses ces derniers temps. C'est le moment de voyager un peu. Alors bon je dois quand même vous avertir...Quand on voyage en pensée sur un blog d'éthique il y a un risque: croiser des enjeux lourds, qui touchent beaucoup de monde, et fort difficiles à résoudre. Ou plutôt, le risque est de commencer à voir ces enjeux, qui sans cela arriveraient à nos portes et dans nos poches sans que l'on ne s'en rende compte. Sans doute préfère-t-on ne pas les voir. Peut-être parce qu'ils sont difficiles à résoudre, justement.

Car de notre portable au chocolat, des médicaments qui nous sauvent la vie aux diamants qui signalent qu'on la passera avec un autre, il est devenu très très rare que l'on fabrique quoi que ce soit d'une manière qui, disons, appellerait notre approbation sans réserve comme ça. Regardez cette vidéo. Mais alors jusqu'au bout. Le début est simplement déprimant. La difficulté n'est pas ici de diagnostiquer le problème. Le regarder c'est le voir. Non, ce qui est difficile, c'est de trouver des solutions suffisamment réalistes pour ne pas être de simples expressions de bonne volonté. Il est donc heureux que certains s'y attellent, et tentent de faire précisément cela. C'est en fin de vidéo, ça. Des solutions modestes par rapport aux besoins, peut-être. Mais si une chose comme ça fonctionne vraiment peut-on encore dire qu'elle est modeste?

Ces solutions, certains d'entre vous sont certainement mieux à même de les évaluer que moi. Alors dites-nous. Réaliste? Utile? Bonne idée? Non?

Et si vous en connaissez d'autres, des solutions, même partielles, indiquez-les dans les commentaires. Après avoir vu cette vidéo, on sera très intéressés...

Euthanasie non coupable

Très beau jugement, l'acquittement de la Dre Daphné Berner. Rassurant, aussi. En partie en raison du soulagement pour cette courageuse collègue, qui raconte si franchement et si bien son histoire. Mais ce n'est pas la seule raison. Quelques explications:

D'abord, je ne vais pas vous raconter à nouveau l'histoire. Si vous êtes en Suisse vous la connaissez, et si vous ne la connaissez pas vous la trouverez ici.

Ensuite, pour poser le cadre, il s'agit bel et bien d'un cas d'euthanasie.

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Ah ben voilà...


...ce n'était pas si difficile, non? Le Pape, oui, a trouvé un moyen d'expliquer que dans certaines circonstances l'usage du préservatif était, ok, pas idéal à ses yeux, mais acceptable quand même.

Bon, d'accord, il avait du chemin à rattraper. Et puis maintenant, devant les louanges de la planète, certains se sont hâtés de minimiser ce qui, en fait, aurait véritablement changé. C'est dommage. Mais qu'importe. A ceux qui ont vraiment beaucoup de mal, il ne peut pas être demandé davantage. Moins nuire, c'est déjà très bien. Et moins nuire lorsqu'on se réclame guide spirituel de plus d'un milliard de personnes, c'est très...très...important.

Un bon point, donc, à Benoît XVI. Ceux qui scrutent les âmes trouveront peut-être sa réaction tardive, et réticente. Qu'ils le regrettent. Mais en médecine on se soucie d'abord des effets. Si ça peut empêcher des bien portants de devenir malades, protéger la vie, maintenir entières des familles menacées, et accessoirement diminuer la misère du monde, alors on est preneurs.

Rappaz: la quatrième solution ?

Faut-il libérer Bernard Rappaz pour lui sauver la vie, puisque la nutrition forcée n'est pas applicable? Difficile question, qui semble diviser le public romand, et les parlementaires fédéraux. Le Grand Conseil valaisan doit se pencher sur sa demande de grâce ce jeudi 18 novembre. Peut-être les appels 'de la dernière chance' auront-ils une influence mais à l'heure actuelle il serait, disons, très surprenant que la grâce soit accordée.

Cela dit, c'est important de comprendre que la question d'une mise en liberté ne se résume pas à cette demande de grâce. Pour comprendre le problème tel qu'il se pose plus réalistement, trois commentaires sont importants ici:

D'abords celui dont vous avez probablement déjà tous conscience:

1) Une suspension de peine n'est pas une grâce
C'est également une mise en liberté, mais sans raccourcissement de la peine totale. Trois jours hors de prison dans ces conditions, c'est trois jours à ajouter en prison plus tard. Cette question, qui est aussi sur la table -pas nécessairement celle du Grand Conseil, mais celle de la situation en tout cas- est donc très différente de celle d'une grâce.

Mais aussi:

2) Suspendre la peine d'un mourant est la norme en Suisse, et non une exception

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Soigner le choléra



Normalement je ne fais pas de message strictement médical sur ce blog.

Mais une fois n'est pas coutume. Car en regardant les mots clés qui mènent des gens ici, je suis régulièrement touchée par ceux qui cherchent comment soigner le choléra. Tomber ici lorsqu'on cherche des réponses cliniques, ça doit être décevant. Si vous cherchez comment traiter le choléra, donc, ce message est écrit exprès pour vous. J'avais mis un lien vers la recette des sels de réhydratation dans un message précédent, mais là une équipe a fait une vidéo. Elle montre, sans paroles donc sans barrière linguistique, comment sauver une vie avec, finalement, les moyens du bords. Attention, on y montre aussi comment reconnaitre le choléra, et certaines images sont donc...ahem...cliniques. Peut-être difficiles à voir. Si le sujet ne vous intéresse pas, ne la regardez pas. Ce blog est toujours un blog de bioéthique, rassurez-vous, ce message est une parenthèse.

Mais là, alors que le choléra continue de sévir en Haïti, plus cette vidéo est disponible mieux c'est...

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Cas à commenter: les médecins et l'arrêt du Tribunal Fédéral

Vous avez le courage pour encore un message sur la nutrition forcée? Bon, cette fois-ci je vais "tricher" et en faire un cas à commenter. Car ces temps, tout le monde semble avoir un avis sur ce qu'il faut faire de l'arrêt du 26 août du TF dans l'affaire opposant le DSASI du Valais à Bernard Rappaz.

Il faut l'appliquer. Et l'on dit que les médecins s'opposent à cela. L'appliquer, oui. Et, je l'ai dit, je ne pense pas que les médecins s'opposent en fait à cela. Peut-être avez-vous un autre avis? Donnez-le. Mais commencez par lire l'arrêt. C'est un document qui vaut la lecture. Bon, je sais, c'est du juridique pas nécessairement facile d'accès. Mais vous êtes des gens intelligents. Et puis il n'est pas si long, il contient beaucoup de choses très intéressantes, et il n'arrête pas ces temps d'être cité de travers. Alors pour en faciliter la lecture (l'outil de recherche de la jurisprudence du TF n'est pas le plus facile du monde), je vous l'ai mis en ligne.

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Multiples amours



Je continue ma règle de ne pas vous parler que de nutrition forcée. Non mais quand même. La vie est beaucoup plus belle que ça. Et pas seulement parce que l'univers est un endroit magnifique. Dans la liste que feraient la plupart des gens sur ce qui rend la vie belle, il faut mettre en bonne place l'amour. A écrire, si vous voulez, avec plein de 'a' et de 'u'. Mais ça c'est votre affaire.

Dans la video qui ouvre ce message - et que vous trouverez ici - Helen Fisher se penche avec une magnifique rigueur scientifique et une surprenante poésie sur les sentiments amoureux. Une conférence qui vaut vraiment le détour. Vous vous y retrouverez certainement. En tout cas, si vous êtes un membre de l'espèce homo sapiens et pas un des robots de google qui passe de temps en temps sur les blogs...

Il y est question d'addiction, et ce n'est pas entièrement surprenant. Alors si vous deveniez accro à ce genre de recherches, il y a une autre conférence dans le même genre ici.

Nous avons besoin des explorateurs



Je sais, je sais, je parle beaucoup de cas tragiques ces temps. Alors quelques messages sur ces choses qui rendent la vie belle. Dans celui-ci, la curiosité. A l'heure où la crise menace les budgets de la recherche, y compris tout près d'ici, une brève mais magnifique conférence de Brian Cox rappelle Pourquoi nous avons besoin des explorateurs. Cliquez sur le lien, ou sur l'image. Et venez me dire ce que vous en pensez.

Encore la nutrition forcée

Difficile, de rester calmes et de réfléchir devant une situation aussi tendue qu'une grève de la faim. En tout cas, c'est l'impression que donne parfois la lecture des journaux commentant le cas de Bernard Rappaz. Alors un peu de clarification.

Point 1 - Les médecins genevois ne s'opposent pas à l'application de l'arrêt du TF: ils l'ont bien compris, c'est tout.

Cet arrêt, qui l'a véritablement lu? On peut l'expliquer ainsi:

L’éthique médicale ne s’oppose pas au droit. Elle n’est pas au-dessus des lois puisque ses fondements sont ancrés dans la loi."

En fait, le Tribunal Fédéral l'admet aussi, cela. OK, du bout des lèvres peut-être. Entre les lignes sans doute. Mais il l'admet. Car comment savoir si on est dans un cas où il est possible de pratiquer une alimentation 'digne'? Vous l’avez deviné : en se basant sur le jugement de cliniciens conscients des valeurs de leur profession. D'où:

Point 3 - L'admissibilité (légale autant qu'éthique) de la nutrition forcée dépend entre autres d'un jugement clinique.

C'est aussi un des critères relevés dans le rapport du Comité pour la Prévention de la Torture dans un rapport de 2009 sur une nutrition forcée appliquée en Espagne. Cet avis a été cité, car il admet que la nutrition forcée peut parfois être admissible. Cela vaut la peine de regarder le détail. Voici leur avis texto:

"14. Si une décision est prise de nourrir de force un prisonnier en grève de la faim, de l'avis du CPT, une telle décision devrait être basée sur la nécessité médicale et appliquée dans des conditions appropriées qui reflètent la nature médicale de la mesure. De plus, le processus de décision doit suivre une procédure établie contenant des gardes-fou suffisant, y compris une décision médicale indépendante. La possibilité d'un recours légal devrait être disponible et tous les aspects de l'application de la décision doivent être monitorés de manière adéquate
(...)
La nutrition forcée d'un prisonnier sans remplir ces conditions pourrait tout à fait correspondre à un traitement inhumain et dégradant."


"Y compris une décision médicale indépendante", qui est donc un des "garde-fou" requis. Le CPT admet donc en effet que la nutrition forcée peut être admissible, oui. Mais seulement si cette conditions, et quelques autres bien sûr, sont remplies.



La menace de la justice valaisanne de poursuivre les médecins qui refusent l'ordre de nourrir de force leur patient est profondément gênante, parce qu'elle semble reposer sur une combinaison de ces erreurs. Les médecins n'ont pas à suivre un ordre fondé sur l'arrêt du TF si la situation n'est pas celle définie par le TF. Et les considérations éthiques sur lesquelles ces médecins se fondent ne sont pas 'extérieures'. Elles sont 'ancrées dans la loi', et font partie des critères dont se sert aussi le TF pour définir le champ de son arrêt: il y exclut la possibilité d'un traitement inhumain et dégradant.

Gênante, cette menace l'est aussi par l'impression qu'elle donne que la logique du bras de fer se poursuit. Que la question est de savoir qui est le plus fort. La question est en fait de savoir comment sortir de cette situation honorablement. Sans sacrifier de valeurs fondamentales. Ou aussi peu que possible.

Pour ça il faut sortir de la logique du bras de fer, justement. Continuer de chercher une solution qui ménage, aut

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Euthanasie?

L'assistance au suicide, et l'euthanasie active là où elle est légale, sont toujours des réponses extrêmes, de dernier recours, face à des tragédies humaines. Faire du mieux que l'on peut, répondre à la souffrance humaine de manière digne et respectueuse, voilà dans ces cas une tâche profondément difficile.

C'est entre autres pour cela que le témoignage de la Dre Daphné Berner est important. Il est également courageux. Admirable, même. Présenter avec une simple honnêteté le drame humain que l'on a vécu, pour en présenter la réalité sans chercher d'abord à se défendre, alors que l'on est accusé d'euthanasie, voilà un exemple rare et qu'il faut saluer. Quand j'ai commenté ce cas en direct, je n'ai pas eu le temps de le dire et je tenais à rattraper ça.

Important, ce cas l'est aussi pour la lumière qu'il jette sur certains aspects troublants de la mort assistée.

Daphné Berner a alors proposé à la jeune femme la chose suivante: "quand vous bougerez votre pied, c’est comme si vous ouvriez la molette et c’est moi qui l’ouvrirai". Et de préciser: "Elle avait l’air très soulagée de ma proposition et c’est ce que nous avons fait. Elle a réussi à dire: maintenant, elle a bougé son pied et j’ai ouvert la manette. Voilà."


C'est toujours difficile à dire depuis la distance confortable à laquelle on lit. Mais si j'essaye d'être sincère je pense que dans un cas semblable, si j’étais convaincue que c’est la volonté ferme de la patiente, et si je me trouvais sans alternative pour apaiser sa souffrance autrement, j’aurais peut-être bien fait la même chose, oui. Ce n'est pas une chose que l'on dit à la légère.

Une partie de la questions est là. Si notre réaction face à ce cas est de penser cela, mettre la personne qui s'est trouvée dans ce cas en prison a quelque chose de problématique. Alors évidemment toute la question n'est pas là. Car une décision éthique peut s'en tenir à un cas singulier. Une décision juridique, non. Et il semble qu'il y ait au moins deux manières de voir ce cas.

Premièrement, on peut y voir une raison de rouvrir la discussion sur la légalisation de l'euthanasie. Si elle est interdite, c'est en raison de l'interdit de l'homicide. Mais on admet tous que certains cas d'homicide (notamment en légitime défense) peuvent être justifiés. Si l'homicide est interdit pour poser une limite -indispensable- à la violence humaine, alors un cas comme celui-ci doit-il vraiment être interdit?

Lire la situation ainsi, c'est commencer par admettre la culpabilité, puis éventuellement se demander si, et à quel point, la norme pose problème. Légaliser l'euthanasie? Ce choix dépendrait des mesures que nous pouvons mettre en œuvre pour éviter des dérives, et de la confiance que nous avons que ces mesures peuvent être efficaces. Mais ce choix devrait aussi dépendre de l’importance que nous donnerons à des cas comme celui de cette patiente. A des personnes qui sont trop limitées par la maladie pour pouvoir se suicider, et qui ne peuvent du coup plus avoir recours à une mort assistée. Ces personnes, il peut actuellement leur sembler raisonnable de mourir plus vite, d’anticiper, avant de perdre la capacité de se suicider. Et ça aussi c’est une dérive.

Mais il y a une deuxième lecture possible de ce cas. Y voir une occasion de questionnement sur les limites entre l'euthanasie et l'assistance au suicide. Cette limite est importante, mais elle ne peut se résumer aux enjeux abstraits. Car ici, qui a actionné le mécanisme? Si au lieu de dire ‘maintenant’, la patiente avait poussé le mécanisme du pied, ce procès n’aurait certainement pas lieu. Redéfinir comme un assistance au suicide un cas où une patiente capable de discernement 'actionne le médecin' au lieu d'actionner le mécanisme pour se donner la mort, peut-on l'envisager? Dans les termes théoriques habituels de ce genre de situation, c'est impensable. Mais s'il existe des cas où ces limites théoriques sont claires, cette histoire-ci montre que ce n'est pas toujours le cas. Sur le plan philosophique, qui est dans cette histoire l'agent, la cause proximale de la mort de la patiente? Il pourrait sans doute y avoir débat. Sur le plan politique, voir ici un cas d'assistance au suicide pourrait être une manière de reconnaître le caractère humainement licite de la décision de la Dre Daphné Berner, sans devoir aborder de front la question de l'euthanasie dans nos lois. Et sans non plus tracer un précédent qui risquerait d'inclure des patients incapables de discernement. Ce serait là une solution assez helvétique, finalement.

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La nutrition forcée, le droit et la déontologie

Chargée, l'actualité de la bioéthique ces temps. Je vais donc faire des messages courts. Commençons par le commencement. Le Tribunal Fédéral a statué concernant le cas de Bernard Rappaz. Les arrêts du TF se trouvent ici, mais comme le site n'est pas évident à naviguer je vous ai fait un copier-coller de celui qui concerne Rappaz ici.

C'est une lecture très intéressante que cet arrêt du Tribunal. Le cas est difficile. Il pose des questions qui touchent au rôle de la loi comme limite, aux droits que l'on garde - ou non- jusqu'en prison, aux limites à poser à la violence humaine, au rôle des éthiques professionnelles, et c'est juste le début. Mais sur ce point des éthiques professionnelles, vous comprendrez que je m'arrête. J'ai fait un billet qui est paru dans Le Temps d'aujourd'hui. Vous le trouverez ici. Bonne lecture et revenez me dire ce que vous en pensez...

Un sujet moins lourd

C'est vendredi, quand même. Et puis c'est la saison des prix IgNobel. Et les prix IgNobel sont en partie responsables du démarrage de ce blog. En plus, cette année la Suisse n'a pas reçu le prix IgNobel de la paix auquel nous semblions ces temps être abonnés. Et que diantre les raisons que je pourrais encore aligner, les IgNobel valent toujours la peine d'être suivis. Voici donc un extrait du florilège de cette année:

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Nutrition forcée

J'ai été prise ailleurs ces temps, car le corps médical suisse vit en coulisse ce qui pourrait être sur le plan éthique une des situations les plus difficiles de ces dernières années. A la surface, un cas qui commence à véritablement énerver l'opinion (si on en croit les commentaires en ligne): le cas extrêmement déchirant du prisonnier gréviste de la faim Bernard Rappaz.

Derrière cette histoire à rallonges, une question qui prend désormais directement les soignants à partie. Dans une décision annoncée fin août, le Tribunal fédéral estime qu’il incombe aux autorités d’exécution des peines d’ordonner une alimentation forcée envers un détenu gréviste de la faim.

Alors si c'était vous, le médecin à qui l'on ordonnait de nourrir de force un prisonnier?

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Merci

«Dieu merci !» dit-on parfois lorsqu’on l’a échappé belle. Les Anglais substituent parfois «Thank goodness !» Merci à la bonté. Cette expression, reprise récemment par le philosophe Daniel Dennett pour remercier ses soignants après une opération du cœur, c’est maintenant à mon tour de la reprendre. J’ai vu ces derniers mois un grand nombre de collègues, un grand nombre d’entre vous, autour de la maladie d’une personne de ma famille. Comme médecin, comme soignant en général, on passe beaucoup de temps à vouloir faire mieux. Mais de temps en temps, il est également bon de se rappeler que notre niveau de départ n’est, disons, pas mal.

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L'art perdu du débat démocratique



Michael Sandel, vous connaissez? Vous devriez. C'est lui qui a fait la série de cours que je vous recommande si vivement dans les liens de ce blog. Dans la vidéo qui ouvre ce message, il pose la question des discussions sur les fondements de nos avis politiques. A voir. Absolument. Et en plus son exemple est la distribution des flûtes, alors forcément je suis conquise d'emblée. Pas que je sache tout à fait encore si je mérite ma flute (aucune réponse n'est donnée), mais moi quand on me prend par les sentiments...

Il aborde aussi une autre question importante: la question de savoir si un sport a un but intrinsèque, ou si les règles sont arbitraires et n'ont de valeur qu'en tant qu'elles sont les règles.

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Cas à commenter: un boxeur

J'ai croisé récemment une lectrice de ce blog. Elle m'a reconnue (j'étais sonnée). Elle était contente (j'étais toute réjouie). Mais elle me disait aussi qu'elle n'osait pas écrire de commentaires (j'étais navrée). L'éthique, c'est fait pour être discuté. D'ailleurs, je vous prépare un billet sur ce thème pour quand j'aurai à nouveau un peu plus de temps. Mais en attendant je vais vous faire, de temps en temps et en guise d'encouragement, des petites présentations exprès pour vos commentaires. Allez, courage, ces questions peuvent tous nous concerner un jour ou l'autre. Et vous pouvez commenter anonymement. En plus, promis, toutes les opinions sont autorisées dans les commentaires. Je ne couperai que les messages publicitaires et les écrits qui transgresseraient franchement les règles de la discussion civilisée.

Je vais commencer avec quelques cas basés sur un article que m'a signalé une amie. Ceux qui ont accès au journal peuvent se préparer à l'avance. Mais pas entièrement, car il n'est que juste que je modifie un peu ces cas qui ne sont pas en accès libre. Tous ces cas sont bien entendu fictifs.

Voici la première description:

Un des principes de base de l'éthique médicale est que le médecin doit œuvrer dans le meilleur intérêt de son patient. Mais il peut y avoir des différences entre le meilleur intérêt pour sa santé, et son meilleur intérêt plus global. Dans le premier cas, donc, vous êtes le médecin d'un boxeur amateur. Il vient vous voir car il a des fractures de côtes, dont il a été victime lors d'une compétition. Vous pensez qu'il faut qu'il s'arrête quelques semaines, le temps de cicatriser. Mais il vous dit que, là, justement, demain, aura lieu le match le plus important de sa vie, avec à la clé une chance de devenir professionnel. Il vous supplie de lui donner un traitement puissant contre la douleur, pour lui permettre de combattre le lendemain.

Que faites-vous? Et quelles sont vos raisons?

L'évolution du comportement moral

Si l'évolution 'sauvage' peut produire des papillons et des orchidées, pourquoi pas le sens de la justice?

Le Centre de bioéthique et sciences humaines en médecine de Genève organise de 2009 à 2011 une série de conférences sur l'interface entre ce que l'on apprend dans les neurosciences (et la biologie de l'évolution) sur comment des être comme nous raisonnent, vivent des émotions, expriment des jugements moraux, et ce que peuvent en dire des philosophes sur un éventuel impact en philosophie morale et politique.

'L'éthique, c'est tout naturel' se passe au Centre médical universitaire. La prochaine conférence sera donnée ce mercredi 9 juin par la Professeur Sarah Brosnan. Elle sera intitulée:


"The Evolution of Moral Behavior"


Attention : exceptionnellement, cette conférence aura lieu dans la salle 7001 (au lieu de C150).
Coup d'envoi à 18h30. Venez nombreux!

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Bonus (oui: re)



Autre brève, sur un autre mode que la dernière fois mais je ne résiste pas: j'ai déjà parlé du phénomène des incitatifs contre-productifs, mais c'est tellement bien appuyé par le dessinateur ici!

Et bien sûr, toute ressemblance avec des événements présents, passés, ou futurs est pu-re-ment fic-tive. Ooops, non: c'est un blog d'éthique je dois être honnête. OK, c'est complètement intentionnel...

Dépasser les malentendus?

Je continue de vous annoncer les colloques de l'Institut d'éthique biomédicale où je travaille, pour ceux qui ne vivent pas trop loin pour cela.

Le prochain aura lieu (pour une fois) ce mardi 1e juin, et il sera question de véracité, d'annonces de mauvaises nouvelles, et de formation des étudiants en médecine à cela. Un domaine jamais simple, plein de risques de malentendus, où l'on peut véritablement progresser sa vie durant, et sur lequel porte depuis maintenant plusieurs années des enseignements spécifiques.

C'est à nouveau cette fois une équipe locale, dont fait partie votre servante. Ça aura lieu le mardi 1e juin, de 12h30 à 13h45. C'est aux Hôpitaux Universitaires de Genève, c'est-à-dire ici. Attention, changement de salle! Cette fois seulement, notre colloque aura lieu à l'Auditoire des Policliniques. Entrez dans l'Hôpital, tournez à gauche juste derrière la réception, et prenez les escaliers après les portes vitrées.

Les oratrices seront:

"Dire la vérité: l'expérience des étudiants autour d'une aptitude éthique"

Voici le résumé:

Dire la vérité -donner à une personne malade une information loyale et complète- est une exigence importante de l'éthique médicale. Nécessaire à une décision autonome, la véracité fait partie intégrante du respect des personnes et de leur intégrité. Mais dire la vérité est souvent difficile, et cette difficulté peut représenter un obstacle au respect de l'autonomie des patients. Autant que des principes, il s'agit ici d'enseigner des aptitudes éthiques. Dans ce but, l'Institut d'éthique biomédicale et l'Unité de développement et de recherche en éducation médicale collaborent depuis plusieurs années pour offrir aux étudiants en médecine un séminaire avec patient(e)s standardisé(e)s, sur les aspects éthiques et communicationnels de l'annonce d'une mauvaise nouvelle. Nous rapportons les résultats d'une étude longitudinale explorant l'expérience des étudiants lors de ce séminaire.

Cette conférence est ouverte à toute personne intéressée. Vous en êtes? Alors à tout bientôt!

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Pas très évolué, tout ça...

Je n'irai pas écouter Harun Yahya.

Et pas seulement parce que les positions créationnistes qu'il défend sont profondément ridicules (quoique: elles sont encore plus simplistes et naïves que le dessein intelligent). Non, écouter des inanités, cela peut parfois représenter un certain intérêt. Mais en plus de ça, à en juger à la manière dont les auditoires se sont vidés en cours de route lors de ses conférences précédentes, il ne présente même pas ses idées de manière intéressante.

Pourquoi, alors, inquiète-t-il?

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Intelligente générosité



La générosité humaine, on la constate à nouveau chaque fois qu'une catastrophe frappe. On l'approuve. On regrette qu'elle ne soit pas plus chronique. Mais c'est quoi, au juste, ce qui rend la générosité bonne? On a parfois l'impression que c'est une bonne chose par définition, ou alors que c'est bon car cela signale un bon caractère. Mais au fond du fond, ce qui nous importe est que la générosité améliore le monde, en apportant une aide réelle.

Sauf que...quand est-ce le cas? Dans la conférence qui ouvre ce billet (cliquez sur l'image), Esther Duflo dissèque la différence entre avoir de bonnes intentions et améliorer le monde, en proposant...des études randomisées de projets sociaux. Ça existe depuis quelques temps déjà, et c'est encourageant de voir cette démarche avancer. Allez voir: c'est intéressant comme tout.

Faim...de quoi?

«C’est que… j’ai pas envie… et puis à quoi bon ?» Le plateau reste plein. La patiente, qui a déjà cédé plusieurs kilos à un cancer avancé, a l’air désolée. Décidée, aussi. Tout à coup, l’odeur du jus de viande se fait compliquée. «On ne va quand même pas la laisser mourir de faim ?» Nous sommes sortis de la chambre et, cette fois, c’est l’un de nous qui parle. L’un de nous les soignants. La révolte est palpable, humaine, l’expression du refus de laisser l’un de nous – l’un de nous les humains – renoncer à la nourriture. Tout à coup, le manque d’appétit d’une personne malade se fait compliqué, lui aussi.

Car alors même qu’elle est la plus simple expression d’un besoin humain, la nourriture est compliquée. C’est un besoin physiologique vital, oui, mais pas seulement. Le genre d’êtres que nous sommes en fait aussi, en couches successives, l’expression de l’inter dépendance humaine, de nos liens sociaux les plus fondamentaux, le signe du soin de l’autre, du refus d’abandonner un semblable, la socialité d’un repas partagé, le rythme du temps, tant de choses qui se mêlent dans ce couloir d’hôpital où une patiente vient de nous dire qu’elle n’a pas faim.

Mais dans tout cela, de quoi n’a-t-elle pas faim ?

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Pour vous faire patienter...



Les obstacles au bloguage ne viennent jamais seuls. C'est un proverbe qui attend juste d'être inventé, je sens. Alors comme vous êtes assez sympas pour continuer de passer par ici même quand je suis prise ailleurs par l'existence, le moins que je puisse faire est de vous donner quelque chose en attendant. La vidéo qui ouvre ce message est intitulée '10 choses que vous ne saviez pas sur l'orgasme'. Cliquez sur l'image, ou alors allez la voir ici. Je dois avouer que j'attendais depuis un certain temps d'avoir une bonne raison de vous la montrer. Voilà qui est trouvé! Il y est question, faut-il le préciser, de vraie science. Mais de celle qui est, disons, plus rarement évoquée aux cours de biologie du secondaire.

Le lien avec la bioéthique? Plein! Mais c'est vraiment pas le plus intéressant. Regardez, vous verrez.

Combien ça coûte, quelqu'un?

Partout, l'esclavage est illégal.

Mais une des informations qui circule trop peu est que, partout, l'esclavage existe quand même.

Non, ooops, pas tout à fait, soyons exacte: si vous vivez en Islande ou au Groenland, il semble qu'il n'y ait pas d'esclaves dans votre pays.

Mais partout ailleurs, oui.

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Attention, changement de salle

Notre colloque aura lieu le lundi 12 avril 2010 à la salle 7-731 et 7-732, au 7e étage de l’hôpital cantonal.

Voilà, je voulais être sure que vous soyez au courant. A bientôt!

L'éthique d'un autre âge...?

Je continue de vous annoncer les colloques de l'Institut d'éthique biomédicale où je travaille, pour ceux qui ne vivent pas trop loin pour cela.

Le prochain aura lieu ce lundi 12 avril, et il sera question d'aspects éthiques de la pratique médicale au 18e siècle.

Nous aurons le plaisir d'accueillir comme orateurs Micheline Louis-Courvoisier et Philip Rieder, qui travaillent tous les deux dans le Programme des Sciences Humaines en Médecine de notre Institut d'éthique biomédicale.

Ils donneront une conférence intitulée:

"Menteur, brutal, indiscret, et pourtant éthique : le médecin avant la biomédecine"

Voici le résumé qu'ils ont donné:

Un médecin a-t-il le droit de manipuler son malade ? De lui inoculer une maladie à son insu ? Ou encore de colporter des nouvelles de ses patients tous azimuts ?

L’éthique occupe une place toujours croissante dans la formation des médecins, conditionnant les pratiques et délimitant étroitement le cadre de la relation thérapeutique. Les praticiens actifs avant les premiers règlements éthiques du XIXe siècle n’avaient pas de tels repères. Leur pratique était-elle alors barbare ? Une série d’anecdotes tirées de la pratique médicale au XVIIIe siècle le laisse penser. La contextualisation de ces gestes nous permettra d’aborder la question du mensonge, de la violence et de l’indiscrétion dans la pratique médicale d’Ancien Régime et de comprendre les raisons qui les rendaient moralement acceptables à l’époque.

Ça aura lieu le lundi 12 avril, de 12h30 à 13h45. C'est aux Hôpitaux Universitaires de Genève, c'est-à-dire ici. Attention, changement de salle: montez au 7e étage, c'est la salle 7-731 et 7-732 (7ème étage Bât. Principal – Médecine Interne - Salle de colloques).

Cette conférence est ouverte à toute personne intéressée. Vous en êtes? Alors à tout bientôt!